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Industrie et entrepreneuriat

Placer les entreprises devant leurs responsabilités

 

La responsabilité sociale des entreprises vient de franchir un cap important avec le lancement d’un nouveau cadre de notification. Les entreprises n’ont désormais plus aucune excuse pour éviter de s’expliquer sur la manière dont elles remplissent leurs obligations en matière de droits de l’homme.

En 2011, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a adopté à l’unanimité les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, que j’avais élaborés pendant mon mandat de six années en tant que Représentant spécial du Secrétaire général sur ce sujet. À la même période, l’OCDE a révisé ses Principes directeurs à l’intention des entreprises multinationales en y incorporant un chapitre sur les droits de l’homme, reflétant les Principes directeurs de l’ONU.

Ce n’est pas une coïncidence. Avec mon équipe, nous avons travaillé en étroite collaboration avec les responsables de la révision des Principes de l’OCDE. Nous avons ainsi pu définir des attentes claires et communes sur la nécessité minimale, pour les entreprises, de respecter les droits de l’homme dans leurs activités et leurs chaînes de valeur. Ces attentes figurent désormais aussi dans d’autres normes internationales.

Lors de mes visites de sièges d’entreprises et de sites d’exploitation, j’ai remarqué que beaucoup d’entreprises prennent des engagements forts en matière de respect des droits de l’homme, dans des contextes souvent difficiles, et en ayant affaire à des chaînes de valeur d’une complexité parfois déconcertante. Ces entreprises bouleversent leurs manières de fonctionner. Elles ont compris que changer leurs pratiques était fondamental pour leur propre réussite, mais également pour la dignité et le bien-être de toutes les personnes touchées par leurs décisions.  

Je me réjouis de constater que, quatre ans seulement après l’adoption des Principes directeurs et la révision des Principes directeurs de l’OCDE, les résultats sont très positifs – plus encore que ce qui est généralement admis. Une enquête récente sur les entreprises et les gouvernements, menée par le Centre de ressources sur les entreprises et les droits de l’homme, ainsi qu’un rapport de The Economist Intelligence Unit, font état d’un fort taux d’adoption et d’avancées remarquables en un temps record. Cependant, même si les entreprises les plus vertueuses ne sont pas les seules à avoir adopté les Principes directeurs de l’ONU et ceux de l’OCDE, celles qui les appliquent ne représentent qu’une infime partie de la communauté mondiale des entreprises. Et comme les médias nous le rappellent régulièrement, certains groupes ont toujours un effet dévastateur sur les droits fondamentaux de nombreuses personnes parmi les plus vulnérables de la planète.

Comment accélérer cette évolution ? La transparence est essentielle, afin de comprendre les véritables difficultés de mise en œuvre auxquelles les entreprises sont confrontées. Elle permet de déceler les lacunes de l’action publique et de collaborer de façon constructive pour remédier aux problèmes systémiques qu’aucun acteur ne peut résoudre seul. Enfin, elle est indispensable à l’instauration de marchés propices à des pratiques économiques responsables, qui récompenseraient les bons élèves et exposeraient les retardataires. Dans cette perspective, le lancement à Londres en mars 2015 du cadre de notification des Principes directeurs de l’ONU ne pouvait être plus opportun. Pour la première fois, nous disposons d’un cadre permettant aux entreprises de rendre compte de la façon dont elles respectent les droits de l’homme, conformément aux Principes directeurs de l’ONU et au chapitre relatif aux droits de l’homme des Principes directeurs de l’OCDE.

Il ne s’agit pas d’un simple cadre de notification. Il pose en termes simples la responsabilité des entreprises en matière de respect des droits de l’homme, par une série de questions pertinentes et directes, auxquelles chaque entreprise doit répondre – tant en interne qu’en externe. C’est un outil puissant permettant aux entreprises d'approfondir leurs débats en interne, d’identifier les lacunes et de s’améliorer en pratique, tout en établissant un dialogue constructif avec les investisseurs, les acteurs de la société civile et les groupes directement affectés par les activités et les relations commerciales de l’entreprise.

Il donne également à toutes ces parties prenantes les moyens d’exiger des informations essentielles sur le respect des droits de l’homme par les entreprises. Les rapports camouflant ces réalités par des données anecdotiques rassurantes ne suffisent plus. Tout gouvernement, place boursière ou système de notation ayant un intérêt à faire progresser la communication non financière, peut désormais mettre à profit ce cadre pour définir des attentes claires en matière de divulgation et pour améliorer la transparence autour des droits de l’homme. Les entreprises qui coopèrent devraient être reconnues et récompensées.

Le cadre de notification des Principes directeurs de l’ONU contribue de façon indispensable à l’effort collectif visant à mettre en pratique les Principe directeurs de l’ONU et ceux de l’OCDE relatifs aux droits de l’homme, ainsi qu’à accélérer le rythme des progrès. De nombreuses entreprises ont commencé à l’utiliser avant même son lancement, avec le soutien de la société civile et de certains investisseurs. Cela atteste de sa valeur et de son utilité, et je conseille vivement à tous de suivre cet exemple.

 

Références

UN Guiding Principles Reporting Network

Principes directeurs de l’OCDE pour les entreprises multinationales

Centre de ressources sur les entreprises et les droits de l’homme – Plateforme des mesures d’entreprise

Voir www.shiftproject.org


Travaux de l'OCDE sur le gouvernement d'entreprise

OECD watch

Thématiques du Forum de l'OCDE 2015

L'Observateur de l'OCDE

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John G Ruggie
Titulaire de la chaire
Berthold Beitz 
spécialisée dans les
droits de l'homme et
les relations
internationales à la
Kennedy School of 
Government de 
Harvard; Président du
conseil d'administration
du Shift Project

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© L'Annuel de l'OCDE
2015

 

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