Partager

Examens par les pairs des membres du CAD

France (2008) Examen du CAD par les pairs : Les Principales conclusions et recommendations

 

Rajouter cette page à vos favoris : www.oecd.org/cad/examenspairs/france

 

> Voir aussi Aperçu synthétique de l'aide de la France

> France (2008) Rapport complet, (121 pages)

 

Résumé

La France est l’un des acteurs clés de la communauté internationale en matière de coopération au développement et dispose d’atouts spécifiques, en particulier ses liens étroits avec de nombreux pays partenaires et la faculté de combiner de multiples outils pour appuyer leur développement. Le CAD invite la France à continuer à assumer son rôle de premier plan et, pour cela, à poursuivre les efforts qu’elle a entrepris depuis 2004 pour améliorer l’impact de son aide et l’efficience de son système. En particulier, la France est invitée à renforcer l’approche stratégique de sa coopération au développement et assurer ainsi que ses moyens et ses instruments sont au service d’une politique claire ayant comme axe premier la lutte contre la pauvreté. Une plus forte concentration géographique sur les pays les moins avancés et les États fragiles lui permettra d’avoir un impact à la hauteur de son poids dans la communauté des donneurs. La France devra par ailleurs sécuriser l’augmentation du volume d’aide publique au développement conformément aux engagements pris. Enfin, elle est invitée à rationaliser son dispositif institutionnel autour d’un pilotage stratégique unifié de l’aide et d’un système plus resserré et efficient proposant un mandat clair pour chaque acteur. Cet effort de réforme devra prendre en compte les impératifs de la mise en œuvre de la Déclaration de Paris. La France pourrait également davantage tirer parti de sa forte implication financière au plan multilatéral par une approche plus stratégique et un renforcement des synergies avec son programme bilatéral. De même, la France pourrait capitaliser sur sa longue expérience en matière de renforcement des capacités pour formaliser son approche, développer des outils opérationnels et alimenter la réflexion de la communauté internationale sur cet enjeu clé, à l’instar de ce qu’elle a entrepris de faire en ce qui concerne l’appui aux États fragiles.

 


Cadre pour la coopération au développement


Orientations légales et politiques


Un acteur clé pour relever les défis de l’aide au développement


Placée en 2007 au 3e rang du CAD pour son volume d’Aide publique au développement (APD), la France est l’un des leaders mondiaux dans le domaine de la coopération au développement. Outre sa forte implication en matière de paix et de sécurité, la France a eu depuis 2004 un rôle moteur au plan international dans des domaines clés tels que le financement du développement, l’implication dans les États fragiles et la protection des biens publics mondiaux. Elle a su également développer des approches innovantes au niveau régional. Du fait de son histoire, la France entretient des liens étroits avec de nombreux pays partenaires, qui se traduisent en termes politiques, économiques et culturels, mais également dans les différentes facettes de sa coopération, qui incluent l’aide au développement, la coopération monétaire et la coopération militaire. La France peut ainsi combiner différentes approches impliquant des acteurs variés, y inclus par exemple la police, et pourrait encore davantage valoriser cet atout en renforçant les synergies entre ces approches. Le rôle de la France dans la construction européenne et son siège permanent au Conseil de sécurité des Nations Unies renforcent encore son poids et sa responsabilité.


Il est essentiel que la France tienne son rôle de manière exemplaire au sein de la communauté internationale, à l’heure où les engagements pris à New York en 2000 concernant les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), à Monterrey en 2002 sur le financement du développement, et à Paris en 2005 sur l’efficacité de l’aide sont autant de défis qui  mobilisent l’ensemble des acteurs de l’aide. La revue générale des politiques publiques comme la rédaction en cours d’un livre blanc sur la politique étrangère devront conforter ce positionnement et cette démarche. Ce faisant, la France devra prendre en compte les atouts, mais également les contraintes liées à son héritage historique, qui conditionne encore largement son système de coopération. Les orientations géographiques et sectorielles de la coopération française, son dispositif institutionnel complexe, mais également ses instruments et la nature de ses relations de partenariat sont autant de reflets de cette construction historique, qu’il importe d’ajuster aux exigences du nouveau contexte international de l’aide au développement.


Formuler à haut niveau les orientations stratégiques de la politique de coopération


La nouvelle Loi organique relative aux lois de finance (LOLF), entrée en vigueur en 2006, améliore sensiblement la lisibilité de l’action publique en matière d’aide au développement. Toutefois, la France n’a pas de document stratégique présentant la politique de coopération et en définissant explicitement les objectifs et la stratégie à moyen terme. Pour l’essentiel, les orientations stratégiques se déduisent des discours ministériels et, depuis 2006, du document de politique transversale annexé à la loi de finances. La croissance économique, la réduction de la pauvreté et l’accès aux biens publics mondiaux apparaissent ainsi comme les trois grands objectifs de la politique de coopération de la France. Celle-ci constitue une dimension essentielle de la diplomatie française, en contribuant aux objectifs d’une meilleure gouvernance mondiale, incluant la gestion et la prévention des risques.


À l’intérieur de ce cadre général, chaque institution développe sa stratégie avec les instruments dont elle dispose, en sorte que les objectifs se déclinent en une multiplicité de secteurs et types d’intervention sans véritable hiérarchisation stratégique. Cette complexité est perçue comme une richesse car elle permet de poursuivre plusieurs objectifs en combinant différents métiers, avec une offre adaptée à chacun des pays. Mais elle est source de confusion, voire parfois de tension, entre les objectifs recherchés, et peut diminuer l’impact des actions. Une formulation à haut niveau des objectifs et de la stratégie à moyen terme de la coopération au développement, qui rappelle le primat de la lutte contre la pauvreté, est nécessaire. Elle permettrait d’articuler plus précisément les missions des acteurs et de guider de façon plus stratégique l’allocation géographique et sectorielle des ressources financières et humaines.


Mieux associer le Parlement et les organisations de la société civile au dialogue stratégique


Le pouvoir de contrôle et d’évaluation des politiques extérieures du Parlement a été renforcé par l’entrée en vigueur en 2006 de la LOLF et pourra être encore conforté par des améliorations techniques. Par ailleurs, la création d’une « délégation parlementaire à la coopération » pourrait être utile en vue d’instaurer, en dehors de la discussion budgétaire, un débat parlementaire sur les orientations stratégiques des politiques publiques ayant trait au développement, y inclus dans leur dimension multilatérale. Cela serait d’autant plus important que le Parlement, à travers son travail législatif, joue un rôle clé pour assurer la cohérence des politiques en faveur du développement. Quant à la concertation stratégique avec les organisations de la société civile, elle devrait être renouvelée par la mise en place annoncée d’un Conseil stratégique sur l’aide publique au développement. Il est souhaitable que la composition, le mandat et l’articulation des travaux de ce conseil avec les instances stratégiques de la coopération permettent un dialogue large et constructif sur la politique de coopération française dans son ensemble.


Maintenir le soutien de l’opinion publique en développant l’éducation au développement


Les Français soutiennent fortement l’aide au développement, comme l’illustre leur implication massive dans nombre d’associations et de jumelages menant des actions en relation avec des organisations du Sud. Toutefois, une partie d’entre eux restent sceptiques quant à l’efficacité de l’aide publique au développement et souhaitent une meilleure information. Il est essentiel de prendre en compte cette demande, mais également de développer leur connaissance des enjeux du développement, puisque la France est un des pays d’Europe où la connaissance des OMD est la plus faible. La France doit donc amplifier l’effort mené depuis 2004 en matière d’éducation au développement, en s’appuyant sur la stratégie qu’elle a adoptée en 2006 et sur le Consensus européen pour le développement : un cadre stratégique pour l’éducation au développement et la sensibilisation, lancé en 2007, et en continuant à renforcer les capacités d’éducation au développement des ONG et des instances de la coopération décentralisée, qui sont de puissants vecteurs de mobilisation du public.


Promouvoir la cohérence des politiques en faveur du développement


Faire de la cohérence une priorité politique : Le secrétaire d’État à la Coopération a mandat de promouvoir la cohérence des politiques en faveur du développement au sein du Conseil des ministres. Toutefois, la France ne dispose pas d’un cadre général donnant une assise politique à un travail interministériel structuré sur ces dossiers de cohérence. Par ailleurs, l’acception par la France de la cohérence des politiques, qui recouvre l’approche coordonnée de l’aide au développement et la promotion des biens publics mondiaux, est limitative puisqu’elle minore la prise en compte de l’impact des politiques publiques nationales sur les pays en développement. Il importe donc que le gouvernement affirme comme un objectif explicite la recherche de cohérence des politiques en faveur du développement, comprise comme prenant en compte de l’impact de chaque politique sectorielle nationale sur les pays en développement. La France pourrait également associer le Parlement et la société civile dans un débat plus large sur ces questions afin de contribuer à nourrir les positions françaises au plan national et européen.


Identifier un mécanisme dédié à la cohérence et renforcer la capacité d’analyse : La France n’a pas de mécanisme institutionnel dédié explicitement à la cohérence des politiques en faveur du développement, mais plutôt des mécanismes de coordination ciblés sur des domaines spécifiques tels que l’aide au développement ou la définition des positions françaises dans le cadre européen. Ainsi, le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), qui est présidé par le Premier ministre, est un instrument clé pour la coordination des programmes d’aide au développement, mais n’est pas un outil de cohérence des politiques. La démarche institutionnelle du gouvernement face à un problème spécifique consiste généralement à créer une commission ad hoc pour l’analyser et proposer des réponses. Ceci a pour inconvénient de ne pas mettre l’accent sur le suivi et l’évaluation des mesures recommandées. La France gagnerait à identifier une structure interministérielle à même d’avoir un mandat explicite de promotion de la cohérence des politiques en faveur du développement. Celle-ci aurait pour mission d’assurer une analyse systématique des questions de cohérence lors de la définition des politiques sectorielles et d’évaluer l’impact de leur mise en œuvre sur les pays en développement. La France devrait également renforcer sa capacité d’analyse pour donner au secrétaire d’État à la coopération les outils lui permettant de faire valoir le point de vue de la cohérence des politiques dans les discussions ministérielles. Ce faisant, elle pourrait tirer davantage parti des travaux menés en France comme au niveau international, et notamment au niveau européen - où elle contribue activement à la réflexion sur la cohérence des politiques.


Recommandations

  • Le CAD invite la France à formuler un document cadre de politique de coopération spécifiant ses objectifs et sa stratégie à moyen terme et s’imposant à l’ensemble des acteurs publics de l’aide.
    La France devrait élaborer un plan d’action pour l’ensemble des stratégies sectorielles et transversales, conduisant à l’établissement de priorités qui seront reflétées dans la programmation budgétaire au plan national.
  • Le CAD félicite la France pour les approches innovatrices qu’elle a développées, en se basant sur sa large expérience, dans plusieurs domaines comme les États fragiles, l’approche régionale et les financements innovants, et l’encourage à élargir le dialogue sur ces sujets au niveau international.
  • La France est invitée à promouvoir la cohérence de ses politiques sectorielles nationales avec les objectifs de développement des pays partenaires par un engagement politique clair et en tirant davantage parti d’une structure pérenne existante ayant pour mandat la promotion et le suivi de cette cohérence.
  • La France est encouragée à continuer à approfondir son dialogue avec les acteurs de la société civile tant au niveau de la concertation stratégique que par rapport à l’agenda de l’efficacité de l’aide.

 


Volume, canaux d’acheminement et répartition de l’aide publique au développement


L’APD de la France s’est élevée à 9.94 milliards USD en 2007, la plaçant au 3e rang parmi les pays membres du CAD. L’aide française a fortement progressé en volume comme en termes relatifs entre 2000 et 2006 - année où des opérations importantes d’allégement de dette ont été réalisées - passant d’un ratio de à 0.30 % à 0.47 % du RNB. Cette progression se situait dans une trajectoire cadrant avec les engagements publics annoncés à Monterrey en 2002 d’atteindre 0.5 % du RNB en 2007 et 0.7 % en 2012. Toutefois, cette croissance était largement liée aux opérations d’allégement de dette. Le niveau atteint en 2007, en recul en termes de volume par rapport aux 10.6 milliards USD de 2006, marque également un décrochage en pourcentage du RNB, avec un taux de 0.39 % du RNB – soit le 11e rang du CAD.


Programmer l’augmentation de l’APD pour tenir les engagements


Le gouvernement a récemment reporté à 2015 l’engagement d’atteindre les 0.7 % du RNB, s’alignant sur l’engagement collectif des pays membres de l’Union européenne. La France s’est engagée à respecter ce calendrier, ce qui est essentiel pour l’ensemble de la communauté internationale. Toutefois, le niveau atteint en 2007 montre que même l’objectif intermédiaire de 0.51 % en 2010 sera difficile à atteindre. La France fait face, comme de nombreux autres pays, à une contrainte budgétaire forte et il est donc essentiel qu’elle planifie les ressources nécessaires afin d’être en mesure de tenir ses engagements internationaux. Elle devrait en particulier tirer parti de la mise en place de son premier budget pluriannuel 2009-11 pour assurer que les crédits budgétaires adéquats sont inscrits en loi de finances.


Ce faisant, la France doit prendre en compte deux éléments qui pèseront négativement sur le volume d’APD : i) les allégements de dette, qui ont représenté jusqu’à 41 % de l’aide bilatérale en 2005-06, vont rapidement décroître dans les prochaines années ; ii) la notification en APD de certaines dépenses doit être revue. C’est le cas en particulier des écolages, qui s’élevaient à 1 097 millions USD en 2006, et pour lesquels la France est invitée à identifier précisément les bénéficiaires, pour ne retenir dans la comptabilisation en APD que ceux qui répondent effectivement aux critères d’éligibilité. De même, la France est invitée à respecter la lettre comme l’esprit des critères de concessionnalité du CAD en ce qui concerne la notification d’APD pour les prêts. Le CAD encourage par contre la France à intégrer les ressources croissantes issues des mécanismes de financement innovants qu’elle a activement contribué à mettre en place, en particulier le produit de la contribution de solidarité sur les billets d’avion versé à UNITAID, dont le montant s’élevait à 225 millions USD en 2007. 


Par ailleurs, la France devra veiller à maintenir à un niveau élevé la part des dotations allouées sous forme de dons là où ils sont nécessaires pour concourir de façon adaptée aux objectifs de lutte contre la pauvreté. La France tend à augmenter sensiblement la part des prêts concessionnels dans son aide publique. Ainsi, les engagements de prêts représentaient en 2006 les deux tiers des concours financiers de l’aide bilatérale programmable de la France. Ces prêts peuvent contribuer efficacement au développement lorsqu’ils sont bien conçus et adaptés au contexte, d’autant que, par leur effet de levier, ils permettent d’augmenter le volume des financements consacrés au développement pour un coût identique pour le contribuable français. Toutefois, les prêts ne sont pas appropriés dans tous les secteurs et dans tous les pays, et il est essentiel qu’une logique d’instrument ne prévale pas dans les choix d’allocation géographique et sectorielle de l’aide, au détriment de la prise en considération des objectifs de lutte contre la pauvreté. Cela suppose un cadre stratégique clairement établi s’imposant à l’ensemble des acteurs institutionnels. Sur un plan opérationnel, la France devrait examiner la possibilité de rendre fongibles les lignes budgétaires « prêts » et « dons », relevant actuellement de la compétence de deux ministères différents.


L’aide pays programmable de la France représentait  29 % de son aide publique bilatérale  en 2005, alors que la moyenne du CAD s’établissait à 46 %. En augmentant le volume de son aide, la France devra veiller à choisir des instruments qui lui permettent de garder un volant d’action suffisant pour pouvoir assumer pleinement son rôle d’acteur de premier plan dans les pays et secteurs prioritaires.


Aide bilatérale : renforcer la concentration géographique et sectorielle


Concentrer l’aide bilatérale sur les pays clés : L’aide publique bilatérale est allouée principalement aux 55 pays de la Zone de solidarité prioritaire (ZSP), avec pour objectif premier l’appui à la réalisation des OMD et une priorité accordée à l’Afrique : en 2006, 70 % de l’aide française bilatérale allouable lui a été consacrée. À côté de la ZSP, la France étend sa coopération aux pays émergents d’Asie et d’Amérique latine, à travers les activités de prêt de l’AFD et avec un objectif de préservation des biens publics mondiaux. Aussi, hors annulations de dette, la concentration géographique ne progresse pas. Parallèlement, la part de l’aide allouée aux pays les moins avancés (PMA) diminue. Elle ne représentait que 20 % de l’aide bilatérale allouable en 2006 et seuls six PMA figuraient parmi les vingt plus importants récipiendaires de l’aide française en 2005-06, hors opérations de remise de dette. Cette dispersion tend à affaiblir la position de la France auprès de la plupart des partenaires historiques et en particulier des PMA. Or, il est important que la France garde les moyens d'une stratégie ambitieuse d’appui à la lutte contre la pauvreté dans ces pays, où elle bénéficie d’un avantage comparatif lié à une relation de long terme à multiples facettes. Il serait utile pour la France d’élaborer une stratégie géographique ciblée sur un plus petit nombre de pays, notamment parmi les PMA et les États fragiles. La France devra pour cela prendre en compte sa valeur ajoutée, en lien avec la réflexion sur la division de travail au niveau européen.


Opérationnaliser les stratégies sectorielles : La France a élaboré des stratégies sectorielles et transversales dans tous les domaines clés de son assistance, et elle tente de concentrer son aide sur trois secteurs dans les pays partenaires. En dépit de cela, l’analyse des allocations sectorielles laisse l’impression d’une faible lisibilité de l’aide française au regard de ses objectifs. Ainsi, sur les 1.6 milliard USD alloués à l’éducation en 2005-06 (soit 17 % de l’APD bilatérale), seuls 151 millions USD sont destinés à l’éducation de base, très loin derrière le montant des écolages et des bourses d’enseignement supérieur. La France consacre également un montant supérieur (164 millions EUR en 2006) à la diversité culturelle, qui comprend  le maintien d’un réseau de plus de 250 institutions qui appuient des actions culturelles ainsi que la promotion de la langue française. La France devrait évaluer l’impact de ces différents types d’appui sur le développement des pays partenaires pour, sur cette base, ajuster leur pondération en sorte de maximiser l’impact sur la lutte contre la pauvreté et sur le développement économique. Des facteurs tant historiques que politiques et administratifs font qu’en réalité l’aide française reste dispersée au niveau des pays partenaires. La France gagnerait à définir plus clairement sa vision des priorités sectorielles pour mieux les intégrer dans le processus de programmation. Cela faciliterait la nécessaire opérationnalisation des stratégies sectorielles et transversales, y inclus la stratégie genre adoptée en décembre 2007 et qui requiert la définition d’un plan d’action précis.


L’aide multilatérale : renforcer le positionnement stratégique


La France a alloué 27 % de son APD via le canal multilatéral en 2006, avec une place prépondérante revenant à la Communauté européenne - la France était le premier souscripteur au 9e FED - et des contributions très importantes à certains fonds verticaux ainsi qu’aux banques de développement. Le tiers restant de l’aide multilatérale est alloué à quelque 150 institutions, soit une dispersion qui peut diminuer l’influence de la France au plan international. Par ailleurs, l’absence d’une vision stratégique globale à moyen terme de l’aide multilatérale limite l’ampleur et l’impact des articulations avec le volet bilatéral de l’aide française. Aussi le gouvernement gagnerait-il à élaborer une stratégie plus explicite envers l’ensemble des acteurs multilatéraux et à réexaminer en conséquence son portefeuille d’engagements multilatéraux, afin de mieux cibler les efforts en termes de positionnement et de recherche d’alliances au plan bilatéral comme multilatéral.


Recommandations

  • Le CAD invite la France à respecter ses engagements internationaux concernant le volume de l’APD. A cette fin, il l’invite à mettre en place une feuille de route de progression vers les objectifs européens de l’APD pour 2010 et 2015, et à tirer parti des lois de finances triennales pour inscrire les crédits budgétaires correspondants.
  • Ce faisant, la France devrait chercher à aligner l’allocation de son aide et ses choix d’instruments avec ses nouvelles orientations stratégiques.
  • La France devra veiller à ce que sa notification annuelle des statistiques d’APD soit conforme aux directives sur les critères d’éligibilité à l’APD qui sont établies par le Comité.
  • La France devrait concentrer son aide sur un plus petit nombre de pays, notamment parmi les moins avancés et les États fragiles. Ce faisant, elle devrait veiller à assurer un équilibre approprié de dons et de prêts.


Gestion et Organisation


Rationaliser le dispositif institutionnel et mieux intégrer l’action de l’ensemble des acteurs


En dépit des réformes entreprises depuis 1998, le système institutionnel, qui rassemble une multiplicité d’acteurs autour des trois institutions clés que sont la Direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID), la Direction générale du Trésor et de la politique économique (DGTPE) et l’Agence française de développement (AFD)* demeure complexe et fragmenté. Les mandats de certaines entités, dont aucune n’est dédiée exclusivement à l’aide publique au développement, se recoupent partiellement. Le pilotage stratégique de l’aide apparaît éclaté entre différents lieux. La réforme poursuivie en 2004 a certes permis une meilleure coordination de l’ensemble des acteurs, notamment à travers l’activation du CICID et de son Secrétariat, mais elle n’a pas achevé la simplification du système, ce qui pèse sur son efficience. Les logiques institutionnelles combinées aux mécanismes d’allocation budgétaire nourrissent la rigidité du système.


Le CAD encourage la France à poursuivre l’effort de réforme pour rationaliser son dispositif institutionnel et en améliorer l’efficience. Ceci suppose de combiner un lieu de pilotage stratégique clairement identifié et définissant les objectifs stratégiques s’imposant à l’ensemble des acteurs, une mission budgétaire unique et un opérateur principal permettant une gestion harmonisée des ressources humaines et des instruments de l’aide. En reconfigurant son système, la France pourra veiller à refléter de façon adéquate la priorité donnée à la coopération au développement, en proposant un positionnement institutionnel de son chef de file politique qui lui permette de rassembler les diverses institutions autour d’une vision claire. Le renforcement du rôle de l’AFD en tant qu’opérateur pivot devra être accompagné d’une réflexion sur l’incidence en termes d’organisation, de ressources humaines et de modalités opérationnelles de l’agence, mais également en termes de statut juridique, l’agence de coopération devant rendre compte de son action au pouvoir politique en charge du pilotage stratégique. Plusieurs modèles existent au sein du CAD, auxquels la France pourrait utilement se référer pour préciser son propre système.


Le système d’aide de la France est composé de nombreux autres acteurs, notamment les organisations non gouvernementales (ONG), les instituts de recherche et la coopération décentralisée, qui sont une force avec laquelle la coopération française pourrait s’associer davantage. Ceci nécessiterait la mise en place de partenariats stratégiques et opérationnels plus forts, relayés au niveau du terrain par une plus grande coordination. En particulier, le CAD encourage la France à augmenter sensiblement la part de l’APD allouée via les ONG, ainsi qu’elle s’y est engagée, et à tirer davantage parti de la ressource qu’elles représentent, en particulier dans les pays les plus pauvres et fragiles. Par ailleurs, quelque 3250 collectivités territoriales participent à la mise en œuvre de projets de coopération décentralisée. Ce foisonnement, riche en ce qu’il signifie de mobilisation pour le développement, se traduit par une multiplication d’interlocuteurs et de projets dans certains pays partenaires, pour des montants engagés souvent limités, si l’on excepte le cas de certains conseils régionaux. Afin d’améliorer l’efficience et l’impact de ces appuis, la France pourrait davantage promouvoir la mise en place d’approches et de procédures communes ainsi que la recherche de synergies entre acteurs.


Améliorer la gestion de l’aide


Poursuivre l’amélioration de la programmation de l’aide : Trois innovations majeures ont été entreprises depuis la dernière revue du CAD pour permettre à la France de gérer la programmation de son aide d’une façon plus stratégique. Il s’agit de : i) la mise en œuvre depuis 2006 de la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) qui, avec le document de politique transversale, permet une plus grande lisibilité de la politique de coopération ; ii) la mise en place, à partir de 2004, des documents cadres de partenariat (DCP), qui visent à guider l’action de la coopération française dans les pays partenaires pour une période de cinq ans; et iii) la Conférence d’orientation stratégique et de programmation, qui permet de valider une programmation indicative des ressources allouées à chaque pays et de procéder à une revue du portefeuille des opérations. Ces mécanismes, qui sont une base de départ essentielle, devront encore être améliorés dans les années à venir pour mettre en place une programmation stratégique de l’aide se référant aux objectifs poursuivis par la coopération française et concordant avec les priorités établies dans les DCP.


Renforcer le pilotage à partir du terrain : La France dispose d’un réseau diplomatique et de coopération très étendu, avec en outre souvent plusieurs institutions coexistant dans les pays partenaires. L’essentiel de la gestion de l’aide française sur le terrain est partagée entre les Services de coopération et d’action culturelle (SCAC) et l’AFD, sous la coordination générale de l’ambassadeur. Chaque acteur garde néanmoins une grande autonomie et travaille selon des modalités et procédures différentes, sur des secteurs qui se superposent parfois. Les communications opérationnelles de l’AFD et du SCAC entre le terrain et Paris s’effectuent principalement de manière parallèle. Une réforme du dispositif de la France sur le terrain est donc également souhaitable pour en améliorer l’efficience ainsi que pour faciliter l’alignement et l’harmonisation. Elle devrait prendre en considération les axes suivants : i) la poursuite du transfert des opérations vers l’AFD ; ii) l’intégration dans le DCP des cadres de programmation et des outils stratégiques de tous les acteurs publics (centres de recherche, coopération décentralisée, etc.) présents sur le terrain; et iii) le renforcement de la délégation des pouvoirs au niveau du terrain pour le pilotage et la mise en œuvre de l’aide.


Entretenir et renouveler le vivier des ressources humaines : La France dispose d’un vaste vivier de personnel compétent et engagé dans le domaine de développement. Les administrations des trois acteurs principaux emploient environ 2 600 personnes, auxquelles s’ajoutent quelque 1 200 assistants techniques. Les cloisonnements institutionnels entravent la capacité de ce personnel à travailler comme un pool intégré au service des objectifs nationaux de développement. Par ailleurs, il n’existe pas de politique de ressources humaines spécifique à la coopération au développement. Différents statuts coexistent, et le risque d’une perte de qualification du personnel est patent dans certaines directions. Comme l’y invite son Plan d’action pour l’efficacité de l’aide, la France devrait prendre des dispositions pour valoriser les compétences de développement dans la gestion des ressources humaines et adapter le profil du personnel aux nouvelles compétences requises. Ce faisant, la France gagnerait à rechercher une plus grande complémentarité entre spécialistes à l’intérieur du dispositif et avec les autres donneurs au niveau européen ou international ; à offrir des incitations adéquates pour appuyer la décentralisation et la mise en œuvre de l’agenda de l’efficacité de l’aide ; et à favoriser une plus grande utilisation des cadres locaux.


Renforcer l’approche par les résultats : Une culture de résultats se développe à tous les échelons de l’administration française, comme en témoigne l’introduction à travers la LOLF d’outils favorisant une gestion axée sur les résultats, le renforcement des services d’évaluation et la mise en place de nouveaux outils méthodologiques. Des progrès restent nécessaires, en particulier l’introduction d’indicateurs de résultats dans les DCP et la mise en place des évaluations à mi-parcours et finales. Une utilisation plus systématique des résultats des évaluations est également nécessaire pour alimenter une réflexion stratégique à l’attention des décideurs du système, tant au niveau technique que politique. Les expériences de capitalisation des connaissances menées par l’AFD offrent des perspectives intéressantes à cet égard.


Recommandations

  • Afin d’améliorer l’efficience de son dispositif, la France doit poursuivre la rationalisation de son système institutionnel de coopération, en combinant un lieu de pilotage stratégique clairement identifié, une mission budgétaire unique et un opérateur principal, et en ajustant le statut des acteurs institutionnels en conséquence. Sur le terrain, la redéfinition de son dispositif opérationnel devrait permettre une plus grande intégration des cadres et outils stratégiques des acteurs ainsi qu’une plus grande décentralisation des décisions au niveau local.
  • La France est invitée à poursuivre l’amélioration de ses mécanismes de programmation de l’aide pour disposer d’un outil stratégique de programmation à moyen terme se référant aux objectifs poursuivis par la coopération française et concordant avec les priorités établies dans les DCP.
  • Le CAD encourage la France à tirer davantage parti de la ressource que constituent les ONG et félicite la France pour son engagement d’augmenter la part de l’aide publique au développement allouée à travers les ONG.
  • La France devrait définir une stratégie globale pour le personnel travaillant dans le domaine de la coopération au développement, afin de faciliter une plus grande complémentarité entre spécialistes à l’intérieur du dispositif et avec ses partenaires. Elle devrait régulièrement réévaluer le profil de ses spécialistes en conformité avec l’évolution des responsabilités de la coopération française.
  • Le CAD encourage la France à poursuivre son effort de mise en place d’un système de gestion axée sur les résultats et à améliorer l’apprentissage par l’action en intégrant systématiquement l’analyse des résultats des évaluations dans le processus de programmation.

Pratiques pour améliorer l’impact


Mettre en oeuvre l’aide efficacement


Afin de mettre en œuvre les engagements de la Déclaration de Paris de mars 2005, la France a validé en décembre 2006 un Plan d’action pour l’efficacité de l’aide. Toutefois, la mise en œuvre du plan reste timide, et l’Enquête 2006 de suivi de la mise en œuvre de la Déclaration de Paris laisse apparaître une image mitigée de la performance de la France. Celle-ci s’engage essentiellement dans deux axes : le renforcement de la gouvernance des pays partenaires pour assurer la bonne gestion de l’aide et la promotion d’une meilleure coordination entre les donneurs, avec un rôle actif joué dans la définition du code de conduite européen sur la division du travail. La France privilégie l’approche projet et est peu investie dans les approches budgétaires générales (3.8 % de l’aide bilatérale programmable en 2006). Elle défend le principe d’une approche plurielle de la gestion de l’aide, qui soit à la fois flexible pour moduler la panoplie des instruments de l’aide selon les différents contextes, et non limitée au domaine gouvernemental couvert par la Déclaration de Paris. Des changements clés, qui nécessitent une forte volonté politique, sont cependant nécessaires pour permettre que l’aide française soit plus ouverte à l’appropriation, l’alignement et l’harmonisation. Le bagage historique et culturel - notamment en termes d’impact sur la nature des relations bilatérales -, l’éclatement institutionnel du dispositif de coopération et les modalités budgétaires qui rigidifient la gestion par instrument de l’aide rendent cet exercice plus complexe.


Le Plan d’action pour l’efficacité de l’aide devrait devenir l’élément moteur de mise en place des conditions d’amélioration de la mise en œuvre des engagements pris à Paris. En particulier, comme évoqué ci-dessus, la France devra poursuivre la rénovation du processus de programmation entamé en 2004 en veillant, d’une part, à renforcer le caractère partenarial et l’appropriation par le pays partenaire du DCP et, d’autre part, à lier davantage cet exercice à la programmation des ressources pour améliorer la prévisibilité de l’aide. Favoriser l’appropriation et l’alignement suppose également de revoir les modalités d’association du partenaire national à la mise en œuvre des projets et programmes figurant dans le DCP. Par ailleurs, la France devra réexaminer les modalités de ses interventions et le cas échéant les réaménager pour faciliter leur intégration dans des approches sectorielles, conformément aux objectifs de la Déclaration de Paris. La France pourra également davantage s’engager sur le plan de la division du travail, tant en ce qui concerne les choix de concentration géographique sur certains pays que, au niveau des pays, la sélection des secteurs de concentration. Sur le terrain, les exemples de partenariats délégués auxquels la France participe restent peu fréquents, surtout lorsqu’il s’agit pour la France d’être « partenaire silencieux ».


La France souhaite faire évoluer la nature de ses relations avec les gouvernements de certains pays partenaires marquées par l’empreinte du passé colonial, en recherchant l’implication de nouveaux donneurs. Dans ces pays, la France hésite de ce fait à prendre explicitement un rôle de leader dans la communauté des bailleurs, qui pourrait lui revenir du fait de son expertise. Elle devra veiller à ce que le renouvellement des relations bilatérales favorise un dialogue élargi à l’ensemble des bailleurs, sans se traduire par un évitement de sa responsabilité. La France pourrait, en concertation étroite avec la communauté des bailleurs dans chaque pays, examiner quel pourrait être son rôle compte tenu des avantages comparatifs de chacun.


Apprendre par l’expérience sur les thèmes prioritaires


Renforcer les capacités nationales


La France a une longue tradition d’appui dans le domaine du renforcement des capacités nationales, via la formation, la coopération technique apportée dans le cadre des projets et l’appui institutionnel. La France ne dispose pas de stratégie globale sur le renforcement des capacités, mais elle est consciente de la nécessité de continuer à faire évoluer ses outils et d’approcher cette dimension d’une manière transversale. Ainsi, une dimension importante est donnée au renforcement des capacités tant dans le plan d’action pour l’efficacité que dans la stratégie gouvernance de la France. Cette dernière définit une approche globale qui prend en compte la nécessité de renforcer les capacités de l’ensemble des acteurs locaux et d’accompagner les processus d’interaction entre acteurs et institutions. La mise en œuvre de la stratégie gouvernance pourrait permettre à la France, tout en poursuivant l’appui nécessaire en matière institutionnelle (réforme de la fonction publique, amélioration de la gestion des finances publiques), d’explorer d’autres modes de renforcement des capacités (recours à l’expertise locale et à la coopération Sud-Sud, complémentarité renforcée entre le secteur public et le secteur privé) et de prendre plus en compte les actions d’intervenants tels que les acteurs de la coopération décentralisée et les organisations de la société civile, dont les associations de migrants.


Sur le terrain, la visibilité de la France dans le domaine du renforcement des capacités s’est longtemps manifestée par la forte présence de son assistance technique. Les effectifs ont maintenant considérablement diminué et l’assistance technique prend de plus en plus la forme d’une expertise ciblée et de court terme. La France devra poursuivre ce repositionnement de l’assistance technique pour favoriser le développement d’une expertise locale et s’intégrer davantage dans des approches conjointes de renforcement des capacités, qui favorisent l’appropriation et réduisent les risques de substitution.


La France pourrait utilement formuler une stratégie cadre qui intègre l’ensemble de ses priorités et définisse des orientations opérationnelles assorties d’indicateurs de progrès dans le domaine du renforcement des capacités. Ces orientations devraient fédérer les interventions de l’ensemble des acteurs pour assurer la pertinence, la cohérence et la complémentarité des appuis. Leur définition devrait s’appuyer sur les résultats d’enquêtes de perception et d’évaluations d’impact des différentes modalités de renforcement des capacités. Aussi la France devrait-elle renforcer son effort d’évaluation et de capitalisation de ses actions dans ce domaine.


Conflit, paix, sécurité et États fragiles


La France a une longue et vaste expérience d’engagement dans des pays partenaires en situation de fragilité et elle a poursuivi une réflexion sur les formes d’aide les plus efficaces dans ces contextes, tant au plan interne qu’au sein du CAD. Cette réflexion s’est traduite en 2007 par la publication d’un document sur la Position de la France sur les États fragiles et les situations de fragilité et l’élaboration d’un outil de diagnostic, la Grille de lecture des fragilités. L’approche développée par la France vise à créer un environnement propice à la réduction de la pauvreté et à l’instauration d’un développement durable, en restaurant la légitimité de l’État et en réhabilitant les relations dégradées entre État et société civile. La France, comme d’autres donneurs, rencontre des difficultés pour mettre en œuvre ces orientations. De plus, dans un certain nombre de pays orphelins de l’aide, la France se trouve en position de donneur bilatéral quasi exclusif et fait face à l’enjeu d’éviter la dépendance et de guider la communauté des donneurs lorsqu’elle revient dans ces pays négligés. Pour autant, comme l’y invite son document sur les États fragiles, la France devra rester impliquée dans des situations marquées par des performances faibles, en différenciant son approche selon les pays.


Compte tenu de l’importance de son engagement dans les États fragiles, la France gagnerait à réfléchir aux moyens de renforcer la coopération interministérielle, tant au niveau stratégique de la définition des orientations de l’action publique dans les États fragiles que sur un plan directement opérationnel. Cela pourrait passer par la mise en place de structures et de mécanismes de financement formels permettant de mobiliser l’ensemble de l’administration et de veiller à la cohérence des interventions, ce qui est essentiel en matière de réforme du secteur de la sécurité. Pour cela, la France pourra continuer à s’inspirer des outils développés par le CAD dans ce domaine.


Sur le plan des outils, la France pourrait réfléchir aux possibilités d’assouplir le mécanisme du DCP dans les États fragiles, afin d’apporter plus de flexibilité et d’intégrer la dimension de l’action humanitaire. Dans les autres pays, elle gagnera à utiliser sa Grille de lecture des fragilités pour une programmation sensible aux conflits lors de la formulation des DCP, ainsi qu’à renforcer sa capacité de suivi et d’ajustement des programmes en fonction de l’évolution du contexte. La France devrait également veiller à profiler et positionner son assistance technique de manière à éviter, dans la mesure du possible, de pallier les carences en termes de capacité institutionnelle par une pratique d’assistance technique de substitution. De même, la France gagnerait à examiner les moyens qu’elle se donne pour construire la société civile, ce domaine étant appelé à devenir un élément clé de ses programmes selon le document de positionnement. Enfin, le CAD encourage la France à prolonger son appui aux programmes multilatéraux dans les États fragiles en jouant un rôle plus actif dans les enceintes internationales et en développant des stratégies conjointes avec les organismes internationaux.


Recommandations

  • La France est invitée à définir un calendrier et à prendre les dispositions appropriées pour la mise en œuvre de son Plan d’action pour l’efficacité de l’aide. En particulier, le CAD invite la France à renforcer le caractère partenarial du DCP et à prendre les mesures opérationnelles nécessaires pour pouvoir utiliser les modalités les plus appropriées, y inclus l’aide budgétaire globale ou sectorielle au sein de son aide bilatérale et s’engager davantage dans la division du travail entre donneurs.
  • Le CAD encourage la France à jouer un rôle pilote dans les pays partenaires où elle a une relation privilégiée en consultation étroite avec les autres donneurs et en tenant compte de son avantage comparatif.
  • Le CAD encourage la France à capitaliser sur son expérience acquise en matière de renforcement des capacités pour mettre en place un cadre d’orientation dans ce domaine conjuguant l’appui institutionnel au renforcement des systèmes publics, nécessaire pour un impact durable, à d’autres modes de renforcement des capacités.
  • Le CAD apprécie le rôle clé joué par la France dans un grand nombre d’États fragiles. Il l’encourage à renforcer la collaboration interministérielle sur les questions de fragilité des États au siège et au niveau du terrain afin de mieux combiner les différents outils d’intervention, particulièrement en matière de réforme du secteur de la sécurité, et à adapter le processus du DCP afin de pouvoir mieux gérer la flexibilité requise dans les contextes d’instabilité.


Action humanitaire


La France est l’un des premiers pays à avoir approuvé en juin 2003 à Stockholm les Principes et bonnes pratiques pour l’aide humanitaire. Elle est considérée comme un donneur fiable et engagé sur le terrain et elle participe activement aux différents forums concernant l’aide humanitaire. Une forte proportion de son aide humanitaire n’est pas préalablement affectée, ce qui facilite une réponse adaptée aux besoins d’urgence. La France prépare actuellement un plan pour aligner son action sur les principes de Stockholm. Dans cette perspective, le CAD l’invite à prendre en considération les aspects suivants.


La France gagnerait à se doter d’une déclaration de politique générale sur l’action humanitaire définissant les objectifs et la stratégie de l’aide humanitaire et fédérant l’ensemble des intervenants et moyens d’action. Un cadre stratégique pourrait en découler, qui assurerait l’intégration de ces orientations stratégiques dans les systèmes et processus de l’aide française. Par ailleurs, au regard du rôle de la France au sein de la communauté humanitaire internationale et de la vocation universelle qu’elle confère à son action humanitaire au nom des principes d’humanité et de solidarité, les sommes globales allouées à ce secteur paraissent modestes. En effet, avec 1 % de l’aide bilatérale allouée à l’aide humanitaire en 2005-06, elle est bien en deçà de la moyenne du CAD (8 %). Toutefois, ces sommes sont pour une part sous-estimées et devraient être évaluées plus précisément. À cette lumière, la France devrait envisager d’augmenter le volume d’aide alloué à l’action humanitaire, puisque les principes et bonnes pratiques pour l’aide humanitaire appellent à un partage de l’effort en matière humanitaire entre les donneurs.


Sur un plan institutionnel, le soutien à l’action humanitaire est éclaté entre trois guichets de financement gérés par des divisions distinctes au sein du ministère des Affaires étrangères et européennes. D’autres acteurs institutionnels traitent par ailleurs des aspects de prévention, d’alerte précoce et de transition. La France pourrait rationaliser la gestion de l’aide humanitaire en consolidant les responsabilités au sein d’une seule division. De même, elle pourrait procéder à des aménagements institutionnels et à une révision des modalités de financement pour permettre une plus grande intégration et continuité des actions d’aide au développement et d’aide humanitaire. Ceci devrait être prolongé sur un plan opérationnel par l’intégration dans les DCP des activités de prévention et d’atténuation des crises, afin d’assurer une connexion étroite entre les composantes humanitaires et de développement dans la programmation du programme d’aide. Par ailleurs, les évaluations devraient être davantage prises en compte lors de la définition des programmes, comme cela fut le cas concernant la réponse française au tsunami dans l’Océan indien.


Recommandations

  • Le CAD invite la France à formuler une déclaration de politique générale définissant les objectifs stratégiques et les priorités de l’action humanitaire publique ainsi qu’un plan de mise en œuvre.
  • La France devrait consolider au plan institutionnel la responsabilité de la gestion de la réponse aux situations d’urgence humanitaire et examiner les modalités permettant d’assurer une jonction adéquate avec l’aide au développement.

 

*  Et depuis 2007 le ministère de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Développement solidaire.