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Examens par les pairs des membres du CAD

Italie (2000) : Examen d'aide: Résumé et conclusions

 


Du fait de sa situation géographique et du rôle qu'elle joue sur la scène internationale en tant que membre du Groupe des Sept (G-7), de l'Union européenne (UE) et de toutes les grandes institutions multilatérales, l'Italie est un acteur de premier plan du système international de coopération pour le développement. La raison d'être du programme italien de coopération pour le développement, exposée dans la loi-cadre de 1987 et les lignes directrices du gouvernement, trouve indéniablement sa justification dans les réalités actuelles, qui appellent une action globale de la part de l'Italie pour :

  • Mettre au point des programmes efficaces, axés sur la pauvreté et fondés sur le partenariat, de coopération pour le développement avec les pays avec lesquels elle entretient des liens politiques et économiques étroits dans le Bassin méditerranéen, dans le Sud-Est de l'Europe, dans la Corne de l'Afrique, en Afrique australe et dans d'autres régions en développement où elle a de tous temps joué un rôle de premier plan, tout en apportant son concours aux interventions d'aide humanitaire en cas de catastrophe.
  • Contribuer à la stabilisation et au développement économique des pays qui revêtent une importance particulière pour sa propre sécurité et son propre bien-être, en ciblant son action sur la prévention et le règlement des conflits dans les pays et régions en développement où ceux-ci sont susceptibles d'affecter sa propre sécurité (les Balkans par exemple).
  • Promouvoir les objectifs de la politique étrangère italienne, à savoir protéger l'environnement, remédier aux problèmes mondiaux en matière de population et lutter contre le trafic de la drogue, le SIDA et d'autres maladies.
  • Trouver une solution à ses propres problèmes démographiques, induits par le vieillissement et la diminution de sa population. L'Italie attire désormais de nombreux immigrants originaires de pays en développement. Le rôle qui revient à la coopération pour le développement dans cette équation fait l'objet de nombreuses recherches, aussi bien dans les sphères gouvernementales que dans les milieux universitaires. Il s'agit d'un problème complexe et délicat, qui a des retombées importantes pour l'Italie comme pour les pays partenaires.

Des améliorations considérables ont été apportées à la gestion de l'aide italienne Des avancées notables ont été obtenues depuis 1996 grâce aux réformes opérées dans le domaine de la coopération pour le développement, réformes qui ont principalement porté sur certains des fondements du système de gestion de l'aide. Parmi les mesures qui ont été prises figurent notamment les suivantes :

  • Le lancement d'un programme de 120 millions de $ à l'appui de la lutte contre la pauvreté.
  • La formulation de lignes directrices spécifiques dans un certain nombre de domaines et de secteurs et la décision de faire de la lutte contre la pauvreté une constante du programme d'aide italien, conformément à la Stratégie internationale de développement.
  • L'amélioration de la gestion du cycle des projets et la généralisation de son application.
  • L'institution d'un strict contrôle de la qualité des projets au stade de leur approbation.
  • La mise en place d'un ensemble de stratégies par pays en partenariat avec les pays
    bénéficiaires.
  • Les avancées obtenues grâce aux récentes réformes qui s'appuient sur un système de gestion davantage fondé sur les résultats.
  • Le renforcement de la cohérence des politiques grâce à une meilleure coordination entre le ministère des Affaires étrangères et le ministère des Finances.
  • L'instauration de procédures plus ouvertes et plus concurrentielles de passation des marchés.
  • La création de bureaux locaux dans 20 pays.
  • La participation plus active à la coordination de l'aide à l'échelon local.
  • Le resserrement de la coopération avec les institutions multilatérales.
  • Le soutien des activités en faveur de la paix et du règlement des conflits par une assistance humanitaire et une aide au développement.


Les missions sur le terrain du Comité d'aide au développement (CAD) en Ethiopie et en Cisjordanie et à Gaza ont permis de constater que, surtout depuis la mise en place des UTL en 1998, l'Italie a noué des relations plus étroites de partenariat, redoublé d'efforts en matière de coordination de l'aide et mis au point des stratégies-pays dans ces deux pays bénéficiaires de son aide publique au développement (APD) et que d'autres améliorations encore sont en cours. Les programmes d'aide italiens font désormais davantage intervenir les organisations non gouvernementales (ONG), font place à la participation des femmes et des communautés locales et s'appuient sur un partenariat avec d'autres acteurs encore dans le cadre de la coopération décentralisée. L'Italie apporte son soutien à quelques projets judicieusement choisis dans les domaines de l'éducation de base, de la santé génésique et des soins de santé primaire, et de la sécurité alimentaire. Ce type d'activités, qui repose sur une approche équilibrée de la problématique homme-femme, s'inscrit dans le droit fil de la stratégie internationale de développement, a de quoi susciter l'admiration et mérite d'être reproduit.


Il n'en subsiste pas moins des problèmes d'ordre systématique, et les avancées produites par les réformes de ces trois dernières années demeurent fragiles et ne sont pas encore fermement ancrées dans les institutions. Parmi ces problèmes, on citera les suivants :

  • L'insuffisance de personnel professionnel permanent et le déséquilibre de la structure des compétences, aussi bien au siège de la Direction générale de la coopération pour le développement (DGCS) du ministère des Affaires étrangères que sur le terrain.
  • L'absence de perspectives de carrière pour les agents de catégorie professionnelle, qui ont des contrats de durée déterminée.
  • La lourdeur des procédures opérationnelles et administratives, qui mettent désormais
    fortement l'accent sur les obligations de comptes.
  • Le très faible pouvoir de décision dont jouissent les bureaux locaux même si davantage de responsabilités leur ont été récemment déléguées dans la conception des projets.
  • La prise en compte parfois insuffisante des considérations de viabilité.
  • Le fait que, faute de personnel, des stratégies par pays ne seront établies que pour quelques partenaires principaux.
  • Les défaillances du système d'évaluation qui ne permet pas de tirer pleinement les
    enseignements de l'expérience accumulée. Les évaluations ne sont en outre pas exploitées pour promouvoir le dialogue avec les partenaires.
  • La lenteur de la procédure d'examen des propositions des ONG. Une attention insuffisante est portée à l'impact réel des activités des ONG.
  • L'insuffisance du budget alloué à l'information de l'opinion publique sur les questions de coopération pour le développement.


Les autorités italiennes ont jugé que les contraintes systémiques auxquelles se heurtait le programme de coopération pour le développement appelaient une refonte en profondeur des institutions. Cela s'impose de toute urgence si l'Italie veut se doter de structures organiques adaptées propres à promouvoir le développement professionnel, les capacités de gestion et la délégation de pouvoir.


Une réforme en profondeur revigorerait considérablement le programme italien. Si pouvait être levé le principal obstacle actuel en mettant au service de l'aide un personnel de professionnels s'intégrant dans des structures organiques adaptées, le système d'aide italien serait en mesure de gérer un volume d'APD nettement plus important. Dès lors que les spécialistes de la coopération pour le développement seront suffisamment nombreux, dans les services centraux et sur le terrain, et qu'aura été mis en place un système d'incitations pour les garder, il deviendra possible de remédier à nombre des problèmes qui affectent depuis si longtemps le système d'aide italien. Non seulement il en résulterait un meilleur ancrage institutionnel des principes fondamentaux de gestion de l'aide, notamment en matière de programmation par pays, d'examen préalable et d'évaluation des projets, de gestion du cycle des projets et de recours à des procédures concurrentielles de passation des marchés ainsi qu'au niveau des mécanismes d'évaluation et de rétroaction de leurs enseignements, mais en outre il deviendrait possible d'améliorer et d'assouplir la gestion des activités sur le terrain. Qui plus est, et c'est tout aussi important, le système italien de gestion de l'aide pourrait s'en trouver consolidé par l'instauration d'une culture privilégiant les méthodes modernes de gestion de l'aide, fondée sur l'adhésion à une mission commune et un esprit de corps ainsi que sur des normes rigoureuses en matière de reddition de comptes et de professionnalisme.


a) La nouvelle loi proposée


Des membres du Parlement italien ont rédigé une nouvelle loi visant à permettre une telle réforme. Ce processus, qui a exigé de gros investissements en temps et en énergie, a donné lieu à des consultations avec la société civile italienne. Dans ce cadre, une délégation de parlementaires italiens est aussi venue à l'OCDE pour étudier, à des fins de comparaison, les cadres juridiques et organisationnels retenus dans d'autres pays Membres du CAD. Le Sénat a déjà adopté la nouvelle loi. La procédure d'approbation par la Chambre des députés a quant à elle débuté mais reste pour le moment en suspens. Si la loi passe, elle débouchera sur la création d'un nouvel organisme, relevant du ministère des Affaires étrangères, qui sera chargé de la mise en oeuvre du programme d'aide et elle contribuera à de nombreux égards à renforcer l'APD italienne, entre autres par la mise en place de dotations plus adéquates en effectifs, d'une gestion
décentralisée et de nouveaux programmes en direction des ONG.


La création de la nouvelle agence ouvrirait la voie à une augmentation des effectifs de catégorie professionnelle s'occupant de la mise en oeuvre du programme de coopération pour le développement et permettrait à l'Italie d'intensifier son effort global d'aide, dont une fraction exceptionnellement élevée était acheminée ces dernières années par l'entremise des organisations multilatérales. De fait, au cours de la période 1996 à 1998, 62 % de l'APD italienne ont transité par le canal multilatéral, ce qui constitue un record absolu parmi les Membres du CAD. Même si c'est toujours le ministère des Affaires étrangères qui définira les grandes orientations de la politique d'aide, la nouvelle agence sera responsable de toutes les phases de la mise en oeuvre et de l'évaluation du programme.


b) Les réformes susceptibles d'être opérées si la nouvelle loi n'est pas adoptée rapidement


Les autorités italiennes se penchent également sur la question de savoir comment poursuivre le processus déjà engagé si la nouvelle loi n'est pas adoptée rapidement. S'il n'est pas porté remède aux déficiences du système actuel et aux contraintes auxquelles il se heurte, il faut bien admettre que les possibilités qui s'offrent d'augmenter le nombre actuel de programmes et projets d'aide bilatérale directe sont extrêmement limitées. Il est donc essentiel de poursuivre et d'accélérer le processus de réforme engagé depuis trois ans. Il devrait être possible, dans le cadre de la loi en vigueur, d'améliorer le fonctionnement du système par une modification des décrets d'application. Renforcer les effectifs, décentraliser davantage encore la prise des décisions et améliorer les dispositifs d'évaluation et de rétroaction des enseignements de l'expérience sont autant de mesures qui pourraient se révéler utiles à cet égard.


En 1998, les versements nets d'APD de l'Italie se sont accrus de 80 %, pour atteindre 2.28 milliards de $, contre 1.27 milliard en 1997. Même s'il s'est redressé par rapport au niveau exceptionnellement faible de 0.11 % enregistré en 1997 (en raison de la date tardive d'approbation du budget par le Parlement, qui avait conduit à repousser à 1998 le versement de nombreuses contributions multilatérales), le rapport entre l'APD et le produit national brut (PNB) est resté, avec 0.20 %, inférieur à la moyenne du CAD, à savoir 0.24 %. Son rapport APD/PNB classe l'Italie à l'avant-avant-dernier rang des pays du CAD, devant la Grèce et les Etats-Unis, pour 1998. Par le volume absolu de son APD, l'Italie arrive cependant à la septième place des Membres du CAD. D'après les premières estimations, en 1999, l'APD italienne aurait baissé de plus de 20 % par rapport à 1998, avec des versements nets de 1.75 milliard de $ et un rapport APD/PNB de 0.15 %.


Dans le cas de l'Italie, tout accroissement de l'APD doit s'accompagner d'une amélioration des performances grâce à la mise en oeuvre des réformes de gestion précédemment évoquées. L'adoption de la loi actuellement en suspens et la création d'un nouvel organisme exécutant constituent une option de ce point de vue. Quoi qu'il en soit, même si la nouvelle loi n'est pas adoptée, les progrès peuvent et doivent être poursuivis.


Afin de donner suite aux les principales recommandations découlant du présent examen, l'Italie aurait intérêt à :

  • Renforcer les structures de gestion et les capacités mises au service du programme italien de coopération pour le développement. Cela s'impose de toute urgence si l'Italie veut se doter de structures organiques adaptées, propres à promouvoir le développement professionnel, les capacités de gestion et la délégation de pouvoir. Un nouveau cadre législatif et des changements majeurs dans les structures de gestion constitueraient une avancée particulièrement souhaitable.
  • Relever son niveau d'APD afin d'atteindre en trois ans la moyenne du CAD, qui s'élève
    actuellement à 0.24%.
  • Accroître l'effectif de professionnels permanents affecté à la coopération pour le
    développement et rééquilibrer la structure de leurs compétences afin de permettre un meilleur ancrage institutionnel des avancées produites par les réformes de ces quelques dernières années.
  • Elargir à davantage de partenaires le processus d'élaboration de stratégies par pays.
  • Affiner les objectifs et critères sous-tendant le programme d'aide au développement afin de garantir la cohérence entre, d'une part, les pays partenaires, les programmes et les projets retenus et, d'autre part, les stratégies par pays et les plans de développement des pays partenaires.
  • Faire une plus large place aux considérations de viabilité dans la conception et la mise en oeuvre des projets.
  • Déléguer un plus grand pouvoir de décision aux bureaux locaux.
  • Rationaliser les procédures opérationnelles et administratives.
  • Renforcer la fonction d'évaluation afin de permettre l'exploitation des enseignements tirés de l'expérience, et utiliser les évaluations pour promouvoir le dialogue avec les partenaires.
  • Intensifier les activités d'information de l'opinion publique, en s'appliquant en particulier à établir un lien étroit entre la sensibilisation aux problèmes de développement et la question de l'immigration.

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