PISA à la Loupe N°44 blog : Équité de l’affectation des ressources : quels liens avec la performance des élèves ?

 

Qui sème les ressources récolte le succès

Par Marilyn Achiron, éditrice, Direction de l’éducation et des compétences

 

Répondez sans réfléchir : qui dispose des manuels scolaires les plus à jour ? Les élèves des établissements plus favorisés ou ceux des établissements plus défavorisés ? La réponse dépend en fait du pays où vous vivez. Comme le montre ce numéro de PISA à la loupe, certains pays sont non seulement meilleurs que d’autres pour opérer une répartition plus équitable de leurs ressources pédagogiques entre leurs établissements, mais les élèves de ces pays obtiennent aussi en général de meilleurs résultats en mathématiques.

L’enquête PISA 2012 demandait aux chefs d’établissement d’indiquer si une pénurie d’enseignants ou un manque ou une inadéquation en matière d’infrastructures ou de matériel didactique (comme les manuels scolaires) affectait la capité de leur établissement à dispenser son enseignement. Il ressort de ses résultats que si les établissements défavorisés bénéficient d’investissements dans la réduction de leurs effectifs d’élèves par classe, ils sont en revanche plus susceptibles que les établissements favorisés de pâtir d’une pénurie d’enseignants et d’une inadéquation de leur matériel didactique. En règle générale, les établissements dont l’effectif d’élèves est plus défavorisé sur le plan socio-économique tendent à disposer de ressources moins adéquates que les établissements dont l’effectif d’élèves est plus favorisé. 

Au risque d’en surprendre plus d’un, selon les données du PISA, les États-Unis occupent l’avant-dernière place du classement de la zone OCDE, après le Mexique, en termes d’équité de l’affectation des ressources : un élève issu d’un milieu défavorisé sur quatre y fréquente un établissement où, selon le chef d’établissement, l’enseignement dispensé est affecté dans une certaine mesure, voire beaucoup, par un manque ou une inadéquation en matière d’équipement des laboratoires de sciences ; par comparaison, seul environ un élève issu d’un milieu favorisé sur sept y fréquente un établissement dans ce cas. Ces écarts entre établissements favorisés et défavorisés sont encore plus marqués dans les pays d’Amérique latine, notamment au Chili et au Mexique, parmi les pays de l’OCDE. Au Mexique, par exemple, moins d’un élève issu d’un milieu défavorisé sur deux, mais plus de trois élèves issus d’un milieu favorisé sur quatre, fréquentent un établissement doté de façon adéquate en termes de matériel didactique.

Outre ses répercussions majeures au niveau individuel des élèves, l’inégalité de l’affectation des ressources a une incidence sur la performance globale dans l’enquête PISA à l’échelle nationale. Après contrôle de la richesse relative des pays, 19 % de la variation de la performance en mathématiques entre tous les pays et économies ayant participé à l’enquête PISA 2012 peuvent s’expliquer par les différences de réponses des chefs d’établissement concernant l’adéquation ou non de l’équipement des laboratoires de sciences, du matériel didactique, des ordinateurs à usage pédagogique, de la connectivité à Internet, des logiciels didactiques et des ressources de la bibliothèque. Et parmi les pays de l’OCDE, 30 % au moins de la variation de la performance en mathématiques entre les pays sont imputables au degré d’équité de l’affectation des ressources entre les établissements.          

L’enquête PISA montre invariablement qu’en matière d’éducation, l’argent n’a pas réponse à tout (http://www.oecd.org/pisa/pisaproducts/pisainfocus/49685524.pdf), et qu’au-delà d’un certain seuil minimum de dépenses par élève, la façon dont l’investissement initial est utilisé compte davantage que le montant de ce dernier. Lorsque cet investissement se matérialise par des choses aussi concrètes que des manuels scolaires à jour, une bonne connexion à Internet et un centre de documentation bien fourni, la répartition équitable des ressources entre tous les établissements, quel que soit leur profil socio-économique, permet d’offrir à l’ensemble des élèves – et pas uniquement à ceux fréquentant les établissements les plus favorisés – les outils dont ils ont besoin pour réussir.