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Mettre les échanges au service de tous

Mettre les échanges au service de tous

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Face au climat d’incertitude et de tensions qui caractérise aujourd’hui le système commercial, et à l’inquiétude grandissante suscitée par la mondialisation, le libre-échange apparaît menacé. Si le commerce reste généralement perçu de manière positive comme une source de croissance, de développement et d’emploi dans les pays en développement, certaines économies avancées (même si leur population soutient en principe les échanges) ont des avis plus mitigés sur des relations commerciales et des accords commerciaux particuliers.

Mais ce sentiment n’est que l’une des facettes d’une réaction plus générale – qui, outre les échanges, englobe aussi les finances, les technologies et les migrations par exemple – face à la mondialisation et aux systèmes économiques et politiques nationaux au lendemain de la crise économique mondiale. Nombreux sont ceux, en particulier dans certaines économies avancées, qui font part de la colère et du sentiment de frustration que leur inspire tout un système auquel ils ne font plus confiance pour améliorer leurs conditions de vie et celles de leurs familles. Pour eux, le système actuel est inéquitable et ne dispense pas les bienfaits qu’ils en attendent. De plus en plus d’éléments montrent qu’ils pourraient bien avoir raison

La méfiance à l’égard du système résulte de problèmes bien réels

Depuis la crise économique de 2008-2010, le fléchissement de la croissance mondiale entraîne non seulement une baisse des ressources affectées aux besoins économiques, sociaux, environnementaux et de sécurité courants, mais remet aussi en question les promesses faites aux travailleurs au sujet de leurs retraites et pensions. L’écart de productivité qui se creuse entre les entreprises s’accompagne d’un écart de salaires et d’opportunités pour leur personnel. Les inégalités de revenus s’accentuent dans de nombreuses économies, mais c’est aussi le cas de l’inégalité des chances – souvent, les ménages à faible revenu ne sont pas en mesure d’investir suffisamment dans l’éducation de leurs enfants, ce qui peut avoir des effets préjudiciables de grande ampleur sur les individus et limiter la mobilité sociale.

 

Il existe de grandes disparités entre les régions ; certaines, souffrant d’une productivité plus faible et de moindres possibilités de croissance et d’emploi, prennent du retard. Il faudrait aussi faire en sorte que les entreprises soient plus nombreuses à partager les avantages tirés de l’intégration mondiale des marchés. Les petites et moyennes entreprises (PME) sont souvent peu représentées dans les échanges internationaux. Bien que quelques entreprises « à vocation mondiale innée » et PME très innovantes soient pleinement intégrées sur les marchés mondiaux et qu’un large pourcentage de PME prenne part aux chaînes de valeur mondiales (CVM), en tant que fournisseurs des exportateurs, les relations d’exportation de nombreuses PME sont souvent de courte durée – un an ou deux dans beaucoup de pays.

Plus généralement, la crainte que la concurrence dans l’économie mondiale ne soit faussée par des obstacles à l’accès aux marchés et des mesures publiques est présente dans le monde entier. Que cette inquiétude porte sur les exigences de contenu local, les subventions ou les mesures réglementaires internes qui semblent favoriser les entreprises et les produits nationaux, les pays redoutent que d’autres ne respectent pas les règles du jeu.

 

Dans ce contexte, la transformation numérique entraîne aussi de profonds bouleversements qui s’accompagnent d’opportunités à saisir et de défis à relever. Les technologies de l’information et de la communication contribuent à améliorer la productivité et le bien être et créent des emplois dans des secteurs et des métiers nouveaux, mais suscitent aussi des inquiétudes quant à l’ampleur de la transformation. Selon les estimations, 14 % des emplois sont gravement menacés par l’automatisation (soit plus de 66 millions de travailleurs dans les 32 pays étudiés), et 32 % de plus risquent d’être touchés par une automatisation de 50 % à 70 % des tâches. Même si certains travailleurs ont les compétences nécessaires pour s’adapter, et si la technologie et les gains de productivité créent de nouveaux emplois, on peut de toute évidence s’attendre à des licenciements.

Ces pertes peuvent être lourdes et concerner certains individus parmi les moins à même de s’adapter par leurs propres moyens. Dans les pays avancés, certains secteurs en concurrence avec les produits importés ont aussi connu des pertes d’emploi de grande ampleur. Il est donc essentiel, en plus de veiller à ce que les citoyens puissent tirer parti des possibilités offertes par les échanges et les technologies, d’aider ceux qui se heurtent à des difficultés d’adaptation.

Que peut-on faire face aux inquiétudes légitimes des personnes lésées par un système économique mondial qui n’est ni libre, ni juste, ni ouvert ?

En réalité, les échanges ne sont pas les seuls responsables des problèmes qui suscitent tant d’inquiétude aujourd’hui, et ne parviendront pas non plus à y remédier à eux seuls. Les pouvoirs publics doivent agir sur de nombreux fronts en même temps, en reconnaissant que l’incidence des échanges mondiaux sur les citoyens dépend à la fois des paramètres des politiques nationales des pays dans lesquels ils vivent, et de la nature et de l’ampleur de la coopération économique internationale. Il faut pour cela dépasser les cloisonnements et adopter une démarche beaucoup plus intégrée, au niveau national et international, pour que l’ensemble du système fonctionne mieux au profit d’un plus grand nombre de personnes. On peut commencer par s’intéresser à trois problématiques.

Tout d’abord, l’impact de l’ouverture sur la croissance dépend des conditions de l’économie nationale qui permettent que les avantages attendus se matérialisent et soient équitablement répartis, et que les citoyens et les entreprises tirent profit des opportunités nouvelles. Pour cela, il faut, par exemple, réduire les coûts inutiles que font peser les politiques publiques sur les acteurs des échanges, investir dans les infrastructures matérielles pour relier les personnes aux emplois et aux marchés, et investir dans le capital humain (de la petite enfance à l’apprentissage tout au long de la vie) pour permettre aux individus de tirer parti des nouvelles opportunités.

En outre, nous devons nous employer à ne laisser personne en chemin, et faire en sorte que les revers temporaires ne se transforment pas en désavantages permanents. Il ne suffit pas de prendre des mesures d’ajustement visant ceux qui ont perdu leur emploi à cause des échanges. Pour que l’ensemble du système fonctionne mieux au profit d’un plus grand nombre de personnes, il faut adopter une démarche centrée sur l’amélioration du bien être et sur une croissance plus forte et plus inclusive, et donner aux citoyens, aux entreprises et aux communautés la capacité de s’adapter à des mutations rapides et de profiter des opportunités créées par la technologie, la mondialisation et les échanges. La recette exacte pourra varier d’un pays à l’autre mais les efforts accomplis devront cibler non seulement les marchés de l’emploi et les dispositifs de protection sociale, mais aussi l’égalité des chances.

Enfin, il nous faut utiliser tout l’arsenal des outils de coopération économique internationale pour que le système international fonctionne mieux. Les échanges sont façonnés par des problématiques plus diverses qui jouent sur les interactions entre les pays dans l’économie mondiale : réglementation financière et coopération fiscale, lutte contre la corruption, droits des travailleurs et protection de l’environnement par exemple. Celles-ci font l’objet de différents types d’accords dans la panoplie de la coopération économique internationale, qui vont des règles multilatérales contraignantes, des lignes directrices volontaires et des codes de conduite à la transparence et au dialogue.

Mais le système international d’aujourd’hui ne profite pas à tous. L’absence de conditions équitables au niveau international fait partie des facteurs qui entravent la bonne répartition des avantages tirés des échanges dans et entre les pays, les secteurs et les régions, et parmi les travailleurs. Pour que le système soit plus libre, juste et ouvert, nous devons en combler les lacunes et mener à bien les chantiers inachevés. Et nous devons faire en sorte que chacun, des entreprises aux pays, respecte les règles du jeu.

Le processus d’élaboration des politiques publiques doit aussi s’ouvrir en une discussion plus large qui permette à des citoyens plus nombreux de débattre des enjeux qu'elles recouvrent, d'en évaluer les avantages et les inconvénients et d'acquérir la conviction plus ferme que les arbitrages inhérents à la conclusion d'un accord, quel qu'il soit, sont raisonnables. Tout le monde ne tombera pas d’accord, mais l’approfondissement des connaissances et l’élargissement du dialogue permettront d’aboutir à de nouvelles solutions. Un débat public éclairé peut contribuer à mieux faire comprendre le rôle des échanges dans l’économie. La salle de négociations ne pourra accueillir tout le monde – ce qui présenterait aussi le risque d’une appropriation par les groupes de pression dominants – mais chacun aura une meilleure appréhension des différents choix possibles, et davantage d’occasions de donner son avis sur ces choix, d’informer et d’être informé grâce au débat.

Seul un ensemble moderne, complet et cohérent de politiques commerciales, nationales et internationales, permettra de veiller à ce que les échanges mondiaux soient plus libres, plus justes et plus ouverts, et qu’ils puissent accomplir ce que l’on attend d’eux : contribuer à ce que davantage d’êtres humains aient une vie meilleure.

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