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Migrations et développement

Notes aux médias : Le Burkina Faso doit intégrer la migration dans ses stratégies de développement nationales et sectorielles, d’après un nouveau rapport du Centre de développement de l’OCDE et de l’ISSP

 

Ouagadougou, Burkina Faso, 30 mai 2017 – Le Burkina Faso aurait intérêt à renforcer la politique qu’il met actuellement en œuvre afin de faire de la migration un élément à part entière de ses stratégies de développement. C’est la conclusion d’un nouveau rapport conjoint du Centre de développement de l’OCDE et de l’Institut supérieur des sciences de la population (ISSP), intitulé Interactions entre politiques publiques, migrations et développement (IPPMD) au Burkina Faso.

Ce rapport a été lancé aujourd’hui, à Ouagadougou, en présence du Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation, de Mme le Ministre délégué auprès du ministre des Affaires étrangères, de la Coopération et des Burkinabè de l’extérieur, chargé de la Coopération régionale et des Burkinabè de l’extérieur, de la Délégation de l’Union européenne au Burkina Faso, de l’Organisation internationale des migrations (OIM) et des principaux représentants de plusieurs ministères du pays.

Il analyse les effets de la migration sur les composantes essentielles de la politique publique du Burkina Faso : le marché de l’emploi, l’agriculture, l’éducation, l’investissement et les services financiers. Par ailleurs, il examine l’influence des politiques adoptées dans ces secteurs sur tout un éventail de résultats migratoires, tels que la décision de migrer, l’utilisation des transferts de fonds, le succès de la migration de retour et l’intégration des immigrés.

Ce rapport est le fruit de quatre années de travail de terrain, d’analyse empirique et de dialogue politique incluant la collecte de données auprès de 2 200 ménages burkinabè, soit près de 13 585 personnes. Ce travail a été cofinancé par l’Union européenne. Ses résultats s’appuient sur une méthode innovante d’enquête auprès des ménages qui, pour la première fois, associe des questions sur la migration et sur les politiques publiques. Il s’inscrit dans le cadre d’un projet comparatif plus vaste, qui porte également sur neuf autres pays, à savoir l’Arménie, le Cambodge, le Costa Rica, la Côte d’Ivoire, la Géorgie, Haïti, le Maroc, les Philippines et la République dominicaine.

Les migrants, ainsi que les fonds qu’ils envoient contribuent au développement de leur pays d’origine. S’agissant du Burkina Faso, les émigrants représentent entre 8 et 10 % de la population du pays (90 % environ vivent en Côte d’Ivoire) et les transferts de fonds s’élevaient en 2015 à 4 % du produit intérieur brut (PIB), contre 1 % en 2009. Dans le même temps, de nombreux Burkinabè sont revenus dans leur pays ou ont quitté (pour ceux qui y sont nés) la Côte d’Ivoire, qui a connu près de dix années de guerre civile. Tous ces facteurs concourent au développement du Burkina Faso. Toutefois, s’ils veulent exploiter tout ce potentiel, les dirigeants du pays devraient systématiquement prendre en compte les conséquences multiples des migrations lorsqu’ils élaborent leurs politiques, de même que les effets des politiques sectorielles sur la migration. C’est la raison pour laquelle le Burkina Faso a adopté, au début de l’année 2017, une stratégie migratoire qui fournit aux autorités publiques des éléments d’orientation, en vue de tirer le meilleur parti des flux migratoires.

L’étude conclut qu’il est nécessaire de soutenir et d’approfondir les efforts du Burkina Faso pour que le rôle des politiques migratoires soit pleinement pris en compte. Plus précisément, il convient de faire davantage correspondre les objectifs des politiques migratoires et ceux des autres politiques publiques, afin d’éviter que des effets indésirables ne compromettent l’efficacité de ces mesures

Les pays devraient chercher à établir les conditions permettant aux individus de décider librement s'ils veulent quitter le pays ou y rester. Les politiques publiques devraient donc s’attacher à créer un environnement dans lequel les individus migrent parce qu’ils l’ont choisi et non parce qu’ils y sont contraints. Ainsi, on pourrait s’attendre à ce que les subventions, qui atténuent les problèmes financiers des ménages agricoles, réduisent l’exode migratoire, souvent motivé par des raisons économiques. Pourtant, le rapport IPPMD indique que ce sont les ménages agricoles recevant des subventions qui sont les plus susceptibles de compter un membre qui envisage d’émigrer à l’étranger. De même, en ce qui concerne l’éducation, les ménages qui bénéficient de programmes de distribution de manuels scolaires et de cantine scolaire sont plus susceptibles de compter un émigré que les autres ménages. On pourrait également penser que la formation professionnelle a pour effet de réduire l’incitation à s’expatrier. Or, on constate qu’elle est associée à des projets individuels d’émigration.

En s’appuyant sur ces interactions, on peut mettre la migration davantage au service du développement du Burkina Faso. Par exemple, les subventions agricoles accroissent les taux de migration de retour, ce qui favorise la diversification et l’expansion des activités agricoles. En outre, les transferts de fonds sont souvent utilisés à des fins d’éducation : ils permettent d’envoyer les enfants à l’école, et ce dans de meilleures conditions. Au Burkina Faso, les immigrants contribuent positivement au marché du travail : ils recourent aux agences nationales pour l’emploi pour trouver un travail qui correspond au mieux à leurs compétences.

Le Burkina Faso reste un pays pauvre, mais s’il réussit à mieux tirer parti de la migration dans une perspective de développement, il pourra espérer devenir un pays à revenu intermédiaire. Pour atteindre cet objectif, les autorités nationales doivent toutefois s’efforcer d’instaurer un environnement dans lequel les Burkinabè ne quittent pas leur pays faute d’opportunités, et dans lequel ceux qui émigrent peuvent contribuer au développement de leur pays d’origine. Pour cela, il faut que les pouvoirs publics continuent de tenir compte des migrations dans la conception, la mise en œuvre et l’évaluation de toutes les politiques sectorielles.

Le Burkina Faso dispose déjà des infrastructures et des capacités institutionnelles nécessaires. La nouvelle Stratégie nationale de migration, par exemple, pourrait prévoir que chaque ministère examine les stratégies sectorielles sur l’ensemble du territoire national, et que des spécialistes des migrations participent aux débats visant à définir ces stratégies.



Pour de plus amples informations sur le projet IPPMD, veuillez consulter la page : http://www.oecd.org/fr/dev/migration-développement/ippmd-fr.htm.

Veuillez cliquer ici pour lire l'intégralité du rapport IPPMD.

Toute demande d’interviews ou toute commande d’exemplaires du rapport doit être adressée à Jason Gagnon (jason.gagnon@oecd.org, +33 (0)1 45 24 98 94) du Centre de développement de l’OCDE. Au Burkina Faso, vous pouvez également contacter Jean-François Kobiané, le directeur de l’ISSP directeur@issp.bf  tel + 226 25 30 25 58/59

 

 

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