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Examens par les pairs des membres du CAD

La Suède (2005), Examen du CAD par les pairs. Principales conclusions et recommandations

 

 (Voir également l'aide de la Suède - aperçu synthétique)  

Cadre général et orientations nouvelles

Depuis toujours un rôle de premier plan sur la scène de la coopération pour le développement

La Suède est souvent considérée par les donneurs comme forçant le respect, à la fois par la générosité de ses apports d’aide publique au développement (APD) et par l’esprit d’innovation dont témoignent ses politiques et modalités de coopération pour le développement. Dans le monde en développement, elle est regardée comme un partenaire dévoué. Cette réputation lui a permis de jouer un rôle bien plus important que ne le laisserait supposer le seul volume de l’APD qu’elle est en mesure de dégager. Ses modes décentralisés d’intervention lui assurent une forte présence sur le terrain qui favorise une collaboration active avec les partenaires locaux à l’appui du développement.

La Suède a donné suite à la plupart des principales recommandations que le Comité d’Aide au Développement (CAD) avait formulées à l’occasion de son précédent examen de l’aide de ce pays en 2000. Les réformes qu’elle a opérées ont été avant tout dictées par sa nouvelle Stratégie pour un développement global, adoptée par le Parlement en décembre 2003. Cette dernière prévoit expressément que l’objectif doit être d’affecter 1 % du revenu national brut (RNB) à l’APD, elle fait sans ambiguïté aucune de la lutte contre la pauvreté la finalité suprême de la coopération suédoise pour le développement et préconise une approche à l’échelle de l’ensemble de l’administration en vue d’instaurer un « développement global équitable et durable ». D’un point de vue pratique, particulièrement intéressante est l’exigence qu’elle contient de faire chaque année rapport au Parlement sur l’avancement de sa mise en œuvre.

La question déterminante de la mise en œuvre de la stratégie pour un développement global

La stratégie pour un développement global définit un programme d’action novateur et ambitieux. Elle fait de la Suède le premier des donneurs du CAD à avoir adopté et à appliquer effectivement une approche intégrée du développement, et revêt en conséquence un intérêt particulier pour le CAD et ses membres. La stratégie pour un développement global a vu le jour il y a à peine deux ans et les autorités prennent de plus en plus conscience des défis opérationnels soulevés par sa mise en œuvre. Parmi les problèmes auxquels il a maintenant été entrepris de s’attaquer figurent la nécessité de rallier l’adhésion à la stratégie de l’ensemble de l’administration et la spécification d’objectifs opérationnels au regard desquels opérer des évaluations puis rendre chaque année des comptes au Parlement. Si le mandat découlant de la stratégie pour un développement global est clair et recueille un ferme soutien politique, il n’en reste pas moins beaucoup à faire, au niveau des services centraux comme du terrain, pour donner corps aux principes et intentions qui y sont énoncés.

Mobiliser le soutien du public et des sphères politiques

L’intérêt que le public suédois porte de longue date au monde en développement a incité les sphères politiques à faire de même et a facilité la mise en place d’un solide programme de coopération pour le développement. Reste que le soutien de l’opinion publique est susceptible de varier sous l’effet des évènements mondiaux ; c’est ainsi qu’il a été renforcé par le tsunami survenu en 2004 dans l’Océan indien et qu’il est au contraire affaibli par les articles de presse relatant des faits de corruption observés dans le monde en développement. Afin de rallier durablement l’adhésion du public au degré plus élevé de priorité désormais accordé au développement mondial, les autorités suédoises ont lancé une vaste campagne s’articulant autour des objectifs du millénaire pour le développement (OMD), dans laquelle elles s’appliquent à montrer que ceux-ci constituent le fil conducteur de la stratégie pour un développement global et soulignent l’importance pour leur réalisation d’un effort associant l’ensemble de la société suédoise. Comme ceux des autres pays membres du CAD, les citoyens suédois souhaitent des informations en retour crédibles sur les résultats produits par les programmes d’aide nationaux.

Le nouveau Forum national pour le développement global pourrait se révéler un instrument clé pour entretenir l’intérêt du public et des sphères politiques pour les problèmes du monde en développement en même temps que pour favoriser le dialogue et le partenariat entre les différents acteurs de la société suédoise oeuvrant dans le domaine du développement. L’utilité de ce dispositif, dont la mise en place est préconisée dans la stratégie pour un développement global elle-même, dépendra en définitive du soutien dont il bénéficiera et du pouvoir d’influence et de rassemblement que lui imputent les participants.

Recommandations

  • La Suède est encouragée à partager avec les autres membres du CAD les enseignements qu’elle tirera de la mise en œuvre de sa stratégie pour un développement global, en particulier pour ce qui est du rôle spécifique joué par le Parlement et des moyens qui s’offrent dans la pratique de favoriser l’appropriation par l’ensemble de l’administration de l’objectif de développement mondial.
  • Le degré plus élevé de priorité que la Suède souhaite désormais accorder aux problèmes du monde en développement ne pourra se concrétiser sans le ferme soutien du public et des sphères politiques. La création d’un Forum pour le développement global est une idée novatrice dont la mise en oeuvre nécessitera une attention et l’appui des plus hautes instances. Également déterminante sera la capacité des pouvoirs publics de fournir aux citoyens des preuves des résultats de l’action engagée par la Suède à l’échelon international, notamment à l’appui des OMD.

Volume et répartition de l’aide

Une évolution prometteuse de l’APD mais des problèmes persistants au niveau de sa répartition stratégique

La Suède est depuis toujours un des donneurs les plus généreux au monde. Son rapport APD/RNB, qui avait quelque peu fléchi dans la seconde moitié des années 90, est revenu à 0.79 % en 2003. Conformément à ce que prévoit la stratégie pour un développement global (et aux encouragements prodigués par le CAD en 2000), il devrait atteindre 1 % en 2006. La stratégie stipule aussi que le gouvernement doit œuvrer, dans le cadre de l’Union européenne et de l’OCDE, à l’augmentation de l’APD des autres donneurs. Les efforts déployés par la Suède pour accroître le volume de son APD sont d’autant plus louables qu’ils s’inscrivent dans un contexte d’austérité budgétaire.

Comme le veut l’objectif de lutte contre la pauvreté prôné par la stratégie pour un développement global, les pays les moins avancés et autres pays à faible revenu sont la cible des trois quarts environ de l’aide bilatérale ventilable suédoise, dont plus de la moitié va à l’Afrique. La tendance à la dispersion géographique de l’APD constatée lors de l’examen de 2000 n’en perdure pas moins, ce qui se traduit, et c’est logique, par une diminution des ressources financières et administratives affectées aux bénéficiaires à long terme, sélectionnés sur la base de critères plus stratégiques. L’Agence suédoise de coopération pour le développement international (Asdi) étudie actuellement les critères sur lesquels pourrait se fonder le choix des pays devant faire l’objet d’une coopération à long terme et a établi une liste d’une trentaine de bénéficiaires « à long terme d’une aide substantielle ». La diversité des priorités sectorielles, entre lesquelles existent parfois des chevauchements, ne va pas sans conséquence pour le ciblage et l’efficacité des activités. Le ministère des Affaires étrangères (MAE), dont la préoccupation est de maintenir la présence suédoise à l’étranger, privilégie la répartition des ressources d’APD entre un nombre important de pays mais est ouvert à une limitation du nombre de secteurs d’intervention. Pour le moment, l’accroissement du volume de l’APD suédoise a rendu moins urgente la hiérarchisation des priorités. Avec la prise d’effet de la stratégie pour un développement global, il devrait maintenant être possible de définir des principes plus précis pour la fixation des priorités. Une plus grande sélectivité géographique et sectorielle serait bénéfique pour l’amélioration aussi bien de l’efficience d’acheminement de l’aide au développement que de la collaboration internationale à l’appui des OMD.

Une caractéristique distinctive de la coopération suédoise pour le développement est la place qui y est faite (18 % de l’APD bilatérale) aux organisations non gouvernementales (ONG). La nouvelle stratégie pour un développement global prône une collaboration plus étroite encore avec ces organisations. Étant donné le rôle important attribué à ces acteurs, la Suède pourrait revoir, et actualiser au besoin, l’éventail de ses dispositifs et procédures de collaboration avec les ONG. Cela dit, l’Asdi a déjà entrepris d’intensifier le dialogue avec ces dernières et de réexaminer ses directives internes concernant notamment les critères de sélection et les obligations de comptes des ONG.

Une approche plus stratégique en matière d’aide multilatérale : un impératif

En 2003, la part de l’APD suédoise qui a transité par les canaux multilatéraux s’est élevée à 25.9 %, soit un peu plus que la moyenne du CAD, ce à quoi peuvent être ajoutés les montants importants acheminés par l’Asdi en direction des organismes multilatéraux. Face à l’interdépendance grandissante de l’économie mondiale, les autorités suédoises attachent de plus en plus d’importance à la coopération multilatérale. La stratégie pour un développement global insiste sur la nécessité de mettre en œuvre le programme d’action à l’appui du développement convenu à l’échelon international, afin notamment de faire reculer la pauvreté et d’assurer la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement. La Suède a toujours apporté un vigoureux soutien aux Nations unies et aux institutions financières internationales et elle se montre aujourd’hui de plus en plus disposée à utiliser le canal de l’Union européenne. Cette ouverture grandissante au multilatéralisme ne s’est cependant pas accompagnée de progrès comparables au niveau de la réflexion stratégique et du suivi des performances. La conséquence la plus immédiate de ce recours accru au canal multilatéral est la nécessité pour la Suède de se doter d’une stratégie claire dans ce domaine et d’un système structuré permettant un suivi plus systématique de la performance des instances multilatérales. L’Asdi a maintenant entrepris d’étudier comment renforcer les liens entre ses activités multilatérales et bilatérales.

Recommandations

  • La Suède est encouragée à maintenir son objectif de 1 % et à soutenir les efforts déployés à l’échelon international pour mobiliser l’intérêt et l’engagement financier des donneurs.
  • La Suède est incitée à concentrer davantage son action sur des pays et des secteurs choisis sur la base de critères stratégiques, comme le veut la stratégie pour un développement global.
  • Le MAE doit continuer de s’appliquer, en collaboration avec l’Asdi, à élaborer une stratégie précise en matière d’aide multilatérale et à mettre en place un système de suivi de la performance des institutions multinationales pour étayer ses décisions de financement.

Cohérence des politiques au service du développement

Traditionnellement un rôle de premier plan pour la Suède

La Suède est depuis longtemps consciente à la fois de la nécessité de tenir compte des considérations transfrontières dans la politique intérieure et du fait que les décisions prises au niveau d’un pays ont des retombées pour d’autres pays. La Suède est pour beaucoup dans le consensus grandissant au sein du CAD quant à l’importance de la cohérence des politiques au service du développement. Sa réflexion sur le sujet a abouti à l’adoption de la stratégie pour un développement global, dont l’ambition est la mise en œuvre d’une politique intégrée à l’appui du développement mondial, touchant tous les domaines d’intervention des pouvoirs publics. La stratégie pour un développement global laisse entendre que les autorités suédoises ont un rôle à jouer pour encourager le lancement d’actions dans des contextes multilatéraux, par exemple l’Union européenne ou d’autres instances spécialisées (Doha, Monterrey, Johannesburg, etc.). Elle encourage en outre l’examen objectif, au niveau international, des choix des pays industrialisés et de la concrétisation des engagements souscrits par ces derniers envers le monde en développement.

Même si elles plaident haut et fort pour la cohérence, les autorités suédoises reconnaissent que les difficultés économiques et la pression des groupes d’intérêts nationaux peuvent détourner l’attention des décideurs des besoins du monde en développement. Certains ne manquent pas non plus de rappeler « l’autre facette » de la cohérence, autrement dit le fait que la politique suédoise de coopération pour le développement doit elle aussi devenir plus perméable à d’autres dimensions de l’intérêt national. Dans ces conditions, il est vital que le gouvernement continue de témoigner toujours la même détermination à définir une approche efficace des problèmes de cohérence des politiques.

Des principes à la pratique

La stratégie pour un développement global a stimulé l’intérêt des sphères politiques pour la cohérence des politiques suédoises au service du développement. Si l’idée de progresser dans cette voie suscite un grand enthousiasme, les difficultés que cela soulève dans la pratique sont de plus en plus largement reconnues. Le gouvernement est incontestablement investi du pouvoir de prendre les mesures voulues, mais il devra faire vite afin de tirer pleinement parti des directives fournies par la stratégie pour un développement global. Au plan institutionnel, le MAE devra apprendre à rester impliqué tout en laissant place à une approche novatrice qui fasse de la cohérence des politiques au service du développement l’affaire de tous les secteurs de l’administration. Au niveau analytique, le rapport annuel qui permet de rendre compte au Parlement des progrès de la mise en œuvre de la stratégie est considéré par les autorités suédoises comme un outil essentiel au service de la cohérence des politiques. Afin de garantir que les décisions du gouvernement respectent les directives énoncées dans la stratégie pour un développement global, il serait également important de prévoir un dispositif de suivi régulier et indépendant de la performance de l’ensemble de l’administration. Exploité avec un peu d’imagination, le Forum pour le développement global qu’il est prévu de mettre en place pourrait devenir un instrument de sensibilisation de l’opinion publique et d’apprentissage mutuel.

Recommandations

  • La Suède pourrait, par le biais d’un réseau de donneurs partageant ses conceptions, promouvoir une approche qui permettrait de recenser plus systématiquement les problèmes de cohérence des politiques au service du développement, de les analyser et d’y proposer des solutions.
  • La Suède est encouragée à garder une approche crédible, par le haut, du suivi et de l’évaluation de la mise en oeuvre des orientations définies dans la stratégie pour un développement global en matière de cohérence des politiques.
  • Lorsque le MAE mettra en place le nouvel organisme d’évaluation prévu dans le cadre de la la stratégie pour un développement global, il devra veiller à éviter les doubles emplois avec des dispositifs déjà existants dans la sphère de la coopération pour le développement, et il pourrait envisager de confier à cet organisme une mission s’inscrivant davantage dans la ligne d’une approche à l’échelle de l’ensemble de l’administration.

Gestion et mise en œuvre de l’aide

Une plus grande cohésion et des procédures simplifiées

Au niveau pratique, les problèmes essentiels auxquels se heurte actuellement la coopération suédoise pour le développement sont pour la plupart liés à la nécessité de trouver des moyens concrets de se montrer à la hauteur des ambitions de la stratégie pour un développement global et de la mission qui y est définie. Nombre des réformes que cela implique sont avant tout de nature administrative, compte tenu du cadre solide fourni par la stratégie, de l’attitude favorable de l’opinion publique et des sphères politiques à l’égard de la coopération pour le développement, et de l’existence d’un noyau souple de procédures fondamentales de mise en œuvre. Si l’exercice est mené à bien, il pourrait s’en dégager de précieux enseignements pour les autres membres du CAD.

Par chance, la structure institutionnelle du système suédois de coopération pour le développement est relativement simple et bien organisée. La plupart des grandes décisions font intervenir un juste dosage entre les orientations émanant du Parlement (stratégie pour un développement global), la politique nationale en matière de développement (MAE) et la solide expérience accumulée sur le terrain (Asdi). Une amélioration de l’efficience et de l’efficacité internes de ce processus de décision suppose que le MAE et l’Asdi considèrent de plus en plus leur mission commune de promotion d’un « développement mondial équitable et durable » comme devant donner lieu à un travail en équipe, au niveau des services centraux comme sur le terrain. Etant donné qu’au niveau des ambassades l’intégration organisationnelle est déjà très forte, le bon fonctionnement de ces dernières exige que leurs correspondants au sein des services de Stockholm du MAE et de l’Asdi travaillent eux aussi en équipe. Parallèlement, les responsables du MAE et de l’Asdi devraient réfléchir ensemble au fait que les lettres de dotation annuelles et autres notes d’instruction du MAE apparaissent comme de plus en plus détaillées, avec l’impression qui en résulte d’une intervention dans la gestion au jour le jour des activités de l’Asdi.

Le manque de coordination entre le MAE et l’Asdi risque de rendre inutilement complexes et lourdes les directives pour la mise en œuvre des activités sur le terrain. Du point de vue des acteurs locaux, la coopération suédoise pour le développement est régie par un écheveau de décisions (politiques, prises de position, lignes directrices, etc.) et une multitude de procédures de mise en œuvre et de contrôles de qualité qui mériteraient d’être réexaminés et simplifiés.

Conséquences pratiques de l’appropriation par les bénéficiaires

Depuis l’examen par les pairs de 2000, l’Asdi a déployé des efforts considérables pour décentraliser la prise des décisions opérationnelles vers les ambassades. Les trois expériences pilotes en cours en 2000 ont porté leurs fruits puisque l’Asdi compte aujourd’hui treize missions « totalement autonomes » et six partiellement autonomes et que le processus de délégation de pouvoirs devrait se poursuivre au cours des prochaines années. Cette évolution est conforme à l’attachement manifesté par la Suède à l’appropriation de ses programmes par les bénéficiaires et à l’harmonisation avec les autres partenaires. Ce transfert rapide d’attributions des services de Stockholm vers le terrain oblige cependant à procéder régulièrement à un réexamen à haut niveau des relations entre les services centraux et les missions locales, lesquelles doivent de plus en plus s’apparenter à une totale fusion.

Une considération importante, à long terme, pour l’efficacité de l’action de la Suède à l’échelon local est l’adéquation des ressources humaines (éventail des compétences, répartition des effectifs entre les services centraux et le terrain et délégation de la gestion du personnel aux missions locales) aux besoins futurs du système suédois. Dans un environnement décentralisé, la politique du personnel doit, entre autres, avoir pour objectif d’anticiper très à l’avance les besoins en ressources humaines sur le terrain, de spécifier le statut des professionnels recrutés localement et de faciliter la délégation aux instances de terrain du pouvoir requis pour engager du personnel sous contrat.

La Suède assigne de multiples objectifs à ses ambassades dans le monde en développement, mais ne met à leur disposition que des ressources limitées. Celle de Nairobi, par exemple, où s’est rendue l’équipe chargée de l’examen, doit s’acquitter d’une multitude de missions (d’envergure bilatérale et régionale, dans le domaine du développement, d’ordre commercial et politique, etc.) qui requièrent une gestion très stratégique de ses activités. Il pourrait être fourni aux responsables de l’ambassade des orientations stratégiques couvrant l’ensemble des fonctions opérationnelles, dans ce cas d’espèce une stratégie régionale intégrée et bien structurée (pour l’Afrique orientale et la région des Grands lacs) qui aiderait l’ambassade à mieux cerner son champ complexe d’intervention et à rehausser l’efficience de l’ensemble de ses opérations (canaux et modalités de financement, ciblage sectoriel, recours à la société civile, exploitation optimale des ressources humaines). Après avoir été testée à Nairobi, cette approche pourrait être reproduite pour d’autres ambassades investies elles aussi de responsabilités complexes.

La Suède joue un rôle de premier plan à l’appui des objectifs internationaux d’harmonisation et d’alignement. L’Asdi a arrêté un plan d’action formel en matière d’harmonisation et il ressort de la visite effectuée sur le terrain au Kenya que sa mise en œuvre progresse rapidement. Grâce à la souplesse qui caractérise ses procédures, l’Asdi a pu conclure avec succès des accords de coopération déléguée avec d’autres donneurs partageant ses idées comme les Pays-Bas et la Norvège. La Suède devrait maintenant être en mesure de multiplier le nombre de pays où elle a recourt à ce type de partenariat et le nombre de partenaires avec lesquels elle conclut ce genre d’accords, et contribuer ainsi largement à l’avancement du programme d’action mondial à l’appui de l’harmonisation. De même, l’Asdi a expérimenté diverses modalités d’alignement sur les procédures et systèmes locaux, et pourrait apporter une contribution active au suivi des avantages et des inconvénients de ces arrangements pour le plus grand bénéfice de tous les membres du CAD.

Mieux montrer les résultats obtenus

La stratégie pour un développement global préconise un suivi attentif et une soigneuse évaluation des activités de coopération pour le développement et l’application dans ce domaine d’une gestion davantage axée sur les résultats. Elle appelle aussi le gouvernement à contribuer chaque fois que cela est possible au renforcement de la capacité des pays en développement d’assurer un suivi de leurs propres efforts. Elle suggère que des cibles soient définies dans les stratégies pays, les stratégies régionales et autres documents de planification et qu’elles servent de référence pour la fourniture de rapports réguliers quant aux performances. Des informations en retour des missions locales de l’Asdi sont certes régulièrement communiquées aux autorités supérieures, mais elles ne sont pas toujours centrées sur l’impact des activités entreprises ou raccordées systématiquement à des indicateurs prédéterminés. De nouvelles méthodes de reddition de comptes sur les résultats, qui portent notamment sur les directives applicables aux stratégies-pays, sont actuellement à l’étude. Une plus grande attention au suivi et à la notification de l’impact des activités entreprises améliorerait la crédibilité de l’aide suédoise aux yeux du public et fournirait une assise plus solide pour promouvoir l’instauration de systèmes fondés sur la performance.

Recommandations

  • Le MAE et l’Asdi devraient continuer à définir ensemble des relations opérationnelles propres à stimuler l’efficience de l’ensemble du système et à instaurer un environnement plus propice au travail d’équipe. La décentralisation est une évolution importante et la Suède est encouragée à procéder à des examens réguliers, se fondant sur la collaboration, de ses activités sur le terrain, des moyens de les améliorer, et des arbitrages opérationnels qui pourraient être nécessaires entre les services centraux et le terrain pour en garantir l’efficience. Par ailleurs, inscrire les activités des ambassades dans une optique stratégique intégrée d’envergure régionale pourrait améliorer l’efficacité opérationnelle.
  • A mesure que se poursuit la mise en œuvre de la stratégie pour un développement global, les pouvoirs publics doivent continuer d’étudier les moyens de simplifier encore le système, dans le droit fil des principes d’appropriation par les pays bénéficiaires, de réduction des exigences au niveau des procédures ainsi que d’amélioration de la transparence et de l’efficience.
  • Les besoins en ressources humaines doivent rester une préoccupation permanente. A mesure que sont mises en œuvre des réformes opérationnelles sur le terrain, le gouvernement et l’Asdi devront continuer de s’interroger sur le nombre, le type, les qualifications et le lieu d’implantation des experts du développement.
  • En matière d’harmonisation et d’alignement, les méthodes de la Suède sont déjà bien rôdées et les autres membres du CAD pourraient en tirer des enseignements, d’ordre stratégique aussi bien qu’opérationnel. La Suède peut continuer de collaborer systématiquement avec d’autres donneurs qui sont, comme elle, à même de recourir plus largement aux accords de coopération déléguée.
  • La Suède étudie actuellement les réformes à apporter à ses méthodes de mesure des résultats. Elle est encouragée, dans ce domaine, à s’appliquer à trouver des dispositifs qui allient avec la plus grande efficacité suivi, évaluation et autres approches de la gestion axée sur les résultats.

Aide humanitaire

Une présence forte dans le secteur humanitaire

La Suède affecte une large part de son APD au financement d’activités humanitaires (16 % en 2003) et veille à ce que la mobilisation des fonds qu’elle octroie s’effectue rapidement et selon des modalités souples. Un grand nombre de pays partenaires de l’Asdi se trouvent dans des situations difficiles de transition ou de conflit armé, et c’est ce qui a encouragé le gouvernement suédois à concentrer davantage son effort sur l’articulation entre aide humanitaire et coopération pour le développement. A cet effet il a mis en place une politique d’aide humanitaire qui confirme la ligne déjà suivie jusqu’ici dans la pratique tout en la rendant plus conforme aux Principes et bonnes pratiques pour l’aide humanitaire. Ce choix stratégique pourrait inspirer d’autres donneurs.
La responsabilité de la gestion de l’aide humanitaire est répartie entre le MAE et l’Asdi, le MAE étant chargé de l’élaboration des politiques et de la coordination de l’aide humanitaire, et l’Asdi de la mise en œuvre et du suivi. L’Agence suédoise de services de secours, unité nationale spécialisée dans les interventions en cas de catastrophe et placée sous la tutelle du ministère de la Défense, peut également être appelée à participer à la mise en oeuvre d’actions humanitaires. Les consultations entre le MAE et l’Asdi se sont institutionnalisées et les instructions données à l’Asdi deviennent plus détaillées au fur et à mesure que grandit l’intérêt porté par la Suède à l’action humanitaire. Si l’aide humanitaire ne fait pas l’objet d’une délégation de pouvoir aux services de terrain, l’Asdi utilise néanmoins les coordinateurs régionaux de l’aide humanitaire pour améliorer les évaluations, le contrôle et le « suivi » de son aide humanitaire.

Améliorations à la marge

Bien que la nouvelle politique de la Suède en matière humanitaire ne s’ouvre pas sur des thèmes entièrement nouveaux, elle impose, conjuguée à la stratégie pour un développement global, des exigences inédites auxquelles devront répondre les activités d’aide humanitaire. Les stratégies menées par l’Asdi doivent être à certains égards réexaminées, rationalisées et réaménagées. Il semble en outre que la Suède n’ait pas encore de projet de suivi systématique des modalités d’application concrète de sa politique. En 2004, le ministère des Finances et le MAE ont imposé de nouvelles directives pour la gestion des lignes budgétaires d’APD. Ces dispositions risquent de compromettre l’acheminement par l’Asdi des fonds destinés à financer l’aide humanitaire dans des délais brefs et selon des modalités souples, ainsi que la capacité de l’Asdi de gérer des situations de transition.

La gestion de l’aide humanitaire pourrait être encore rationalisée : plusieurs unités du MAE s’occupent de gérer les fonds transitant par des organismes multilatéraux actifs dans le domaine humanitaire. L’Asdi confie la gestion de ses programmes d’aide humanitaire à un département qui assume de multiples responsabilités, dont celle des actions relevant du soutien à la société civile, de l’aide humanitaire et de la gestion des conflits. La logique qui sous-tend cette organisation est peut être incompatible avec les principes d’une gestion efficace de cette part conséquente, et en augmentation, du portefeuille de l’Asdi, et risque de menacer l’indépendance de l’action humanitaire vis-à-vis d’autres priorités. La gestion sur le terrain pourrait également être encore améliorée en donnant un rôle accru aux coordinateurs régionaux de l’aide humanitaire. Le dispositif actuel de surveillance des activités de l’Agence suédoise de services de secours (ministère de la Défense, MAE et Asdi) semble être l’incarnation d’une conception déficiente de la gestion d’un tel organisme.

Recommandations

  • La politique d’aide humanitaire de la Suède devrait faire l’objet d’éclaircissements sur le plan opérationnel. Le MAE pourrait en effet préciser quels sont les moyens opérationnels à mettre en œuvre pour protéger les civils. Il devrait également étudier les effets négatifs éventuels des directives régissant actuellement l’utilisation des lignes budgétaires affectées à l’aide humanitaire. L’Asdi, quant à elle, devrait envisager de fondre ses documents d’orientation et ses notes d’information en une stratégie détaillée axée sur la mise en œuvre. Le MAE et l’Asdi sont encouragés à mettre au point ensemble des méthodes et des systèmes propres à assurer le suivi de la mise en œuvre de la politique d’aide humanitaire.
  • La gestion de l’aide humanitaire mérite également l’attention. Le MAE devrait envisager de confier la gestion des organisations humanitaires multilatérales à une seule unité administrative, et l’Asdi devrait envisager de créer un service distinct chargé de l’aide humanitaire de façon à préserver l’indépendance de l’action humanitaire et à promouvoir le soutien aux pays en phase de transition. Le rôle et les fonctions des coordinateurs régionaux de l’aide humanitaire pourraient être mieux intégrés entre le MAE et l’Asdi, à Stockholm et au niveau des ambassades. Le ministère de la Défense, le MAE et l’Asdi devraient en outre apporter des éclaircissements sur la nature de leurs relations et de leurs procédures opérationnelles avec l’Agence suédoise de services de secours.

Le rapport complet de la Suède est à venir.

Visitez le site web de l'OCDE consacré à la Suède.

 

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